Le dernier train de Gun Hill

Beau western classique.

Les chevauchées à bride abattue, les ciels immenses et les plaines sans fin, les saloons où l’on boit des litres (je devrais écrire des gallons) de whisky, les filles perdues empanachées et leur drôle d’existence, les colts qui font mouche à tous les coups, les étoiles portées fièrement par les shérifs, les mœurs rudes et les règlements de compte expéditifs, la montée des périls au fur et à mesure que le film avance, tout cela fait partie de notre imaginaire et de nos souvenirs, même pour ceux qui trouvent que le western a un peu abusé de ce folklore…

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En tout cas Le dernier train de Gun Hill, où il n’y a ni Indiens taciturnes, ni cavalerie survenant au bon moment, ni diligence attaquée, ni médecin alcoolique – qui sont aussi parmi les ponts-aux-ânes du genre – est un bien beau film, dans sa sécheresse intelligente, porté par des acteurs qu’on n’a pas toujours trouvé aussi sobres et aussi justes, Kirk Douglas et Anthony Quinn qui emplissent l’espace de leur confrontation et demeurent pour autant fragiles, instinctifs, terriblement humains.

Il y a quelque chose de très classique, presque de grec, dans le film de John Sturges : quelque chose de fatidique qui pèse sur ces quelques heures qui vont de l’arrivée à Gun Hill du shérif Matt Morgan (Kirk Douglas) venu pour faire justice du meurtre et du viol de sa femme par le fils de son meilleur ami et le passage du train qui le reconduira chez lui à Pawnee, besogne faite. Et le riche propriétaire terrien Craig Belden (Anthony Quinn) sait bien que ce fils, Rick (Earl Holliman), n’est qu’une sale petite gouape veule, raciste, lâche mais qu’y peut-il sinon le défendre et essayer de le sauver jusqu’au bout de sa propre vie ? Les liens sont noués serrés et personne ne peut s’en détacher…

Dans la sécheresse épurée du récit, je regrette un peu l’irruption d’une femme, même si le personnage de Linda (Carolyn Jones) n’est ni sommaire, ni insignifiant : mais il me semble que la touche romanesque ainsi donnée atténue un peu le caractère glacial du récit, son côté tragique, qui aurait pu être donc davantage épuré.

N’empêche que c’est drôlement bien, meilleur que Un homme est passé du même John Sturges où, identiquement, un individu isolé, en butte à l’hostilité de tout un patelin parce qu’il vient déranger un ordre établi, repart, lui aussi par le train, ses affaires faites. Ne demeurent sur ses pas qu’un champ de ruines, un désastre et l’amertume de vies gâchées…

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