Fantasia chez les ploucs.
Encore une de ces productions étasuniennes de série qui ont envahi nos écrans en n’apportant que des images poussives d’histoires bien banales ! Comment se fait-il que notre Europe qui a ressenti sur sa propre terre tant de convulsions passionnantes aient pu s’intéresser à ces histoires bouseuses de garçons vachers qui règlent leurs comptes de façon sommaire sur fond de coups de fusils et de bagarres alcoolisées ? J’ai beau en avoir vu une palanquée, je n’arrive pas à concevoir comment on peut être fasciné par ce genre primitif du western, sauf lorsqu’il permet l’évasion vers l’exotisme et qu’il montre de sauvages peignées infligées aux ou reçues des Peaux-Rouges… Mais ça n’a d’agrément que comme les films consacrés à l’empire des Indes, aux maharadjahs fabuleux et aux tigres du Bengale.
Essayons de transposer cette absolue nullité qu’est Les 4 fils de Katie Elder dans un environnement civilisé, à Paris, à Rome, à Londres, à Vienne ou même à New-York : ce serait un petit polar assez mal fichu où quatre frères, plutôt mal élevés, mais qui, comme tous les bandits siciliens, adorent leur vieille maman, se retrouvent à son enterrement et constatent, alors qu’ils l’ont plutôt délaissée, qu’elle avait bien des soucis et qu’un requin vorace lui avait fait bien des misères, la dépouillant à peu près de tout ce qu’elle possédait.
Une fois ces prémisses posées on devine aisément que les quatre garçons, dont le premier, John (John Wayne) paraît être le père, sinon le grand-père du cadet, Bud (Michael Anderson Jr) ne vont pas laisser en tranquillité la petite bourgade dont une canaille, Morgan Hastings (James Gregory) convoite la direction, on ne sait trop pourquoi au demeurant tant elle semble être une indistincte pustule sur le territoire de l’État du Texas. Pustule dont – l’avez-vous remarqué ? – les femmes semblent s’être absentées, à l’exception de Mary Gordon (Martha Hyer), dont on se demande ce qu’elle fait là et de quoi elle vit dans son intérieur hideusement cosy. La plupart des braves gens qui composent la respectable population du patelin semblent ne pas voir que la doucereuse apparence de Hastings et de son crétin de fils, Dave (Dennis Hopper) cache une ambition aussi démesurée que la langueur des plaines infinies du Texas et la grosseur des racines de ses arbres.
Tout le monde soupçonne ces voyous de Elder d’avoir semé, sur les terres apparemment paisibles du comté, l‘abomination de la désolation (Da 11:31) et envisage avec plaisir la disparition de ces fauteurs de troubles, au demeurant de fort mauvaise réputation. Naturellement ça se termine très convenablement pour ces vauriens qui ne perdent qu’un de leurs membres, l’insignifiant Matt (Earl Holliman) au cours de leurs aventures et de leurs pistolétades.
J’ai rarement vu western aussi ennuyeux, aussi poussiéreux, aussi insignifiant ; il ne s’y passe presque rien, sinon le minimum syndical de coups de révolvers et d’explosions diverses ; tout est paresseux ; les habitants du village, pourtant sur les dents, ne paraissent se réveiller qu’après avoir entendu pendant cinq minutes des tirs nourris, le méchant Hastings, poursuivi par le vaillant John Elder se réfugie sottement dans le seul endroit où on est certain de pouvoir le trouver, son magasin d’armes et d’explosifs (j’allais écrire de farces et attrapes) qu’il ne sera pas trop difficile à John de faire sauter en tirant sur un baril de poudre (franchement, dans les pires films de pirates, avez-vous déjà vu le flibustier méchant aller se terrer dans la Sainte-Barbe ?).
Film puéril et languissant où les relations entre les frères, qui auraient dû, prioritairement faire le suc de l’intrigue, sont à peine évoquées… Deux heures de perdues. À fuir.