Voilà un film qui laisse pantois. Surtout pas d’admiration. Mais pas davantage d’agacement ou d’ennui ou d’exaspération : c’est bien pire ! Il n’est pas hypnotique, mais somnifère, il n’est pas insignifiant, il est abyssal de prétention sous des couverts de modestie.
On croit, au début, que c’est l’exercice de fin d’études d’un élève médiocre de la Fémis, comportant la fausse élégance d’un Noir et Blanc mal maîtrisé, les tics insupportables d’un type qui a vu beaucoup de films et se mêle d’en réaliser en cousant ensemble toutes ses références dans un patchwork bien laid, la complication d’un scénario qui se veut subtil, élégant et intelligent et qui n’est que puéril et hétéroclite.
Mais en faisant une recherche, on s’aperçoit que le nommé Benchetrit a déjà réalisé un film de quelque notoriété, Janis et John et en creusant encore on se souvient que c’est à lui que le paisible chanteur Bertrand Cantat a piqué Marie Trintignant avant de traiter la malheureuse comme on sait. Ce n’est donc pas tout à fait un débutant, à qui on pourrait gentiment pardonner des errances maladroites.
C’est donc bien pire : c’est un cinéma qui n’a rien à dire, mais le dit quand même, en se fichant du monde ; qui le dit sans difficulté parce que des petits machins ennuyeux comme ça n’ont aucune difficulté à être produits et financés.
Ceci est naturellement à relier à la délicieuse polémique suscitée, il y a quelques jours, par l’excellente Tribune libre de Vincent Maraval, un des créateurs de la société de distribution Wild bunch (pour ceux qui auraient raté ce coup de gueule salutaire, voici le lien http://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2(..)). Cette délicieuse polémique, donc, révèle enfin la perversion du système, ses dessous crapoteux et les raisons qui obligent à lancer chaque années des tas de machins informes.
On s’explique mieux, dans ces conditions, pourquoi dans J’ai toujours rêvé d’être un gangster, incongrûment, on voit apparaître des cadors comme Jean Rochefort ou Alain Bashung. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai mis 1 et non pas 0 : pour avoir revu, cinquante ans après Les Tontons flingueurs, la silhouette vieillie de Venantino Venantini.