Des qualités.
Je ne m’attendais pas à grand chose en glissant dans mon lecteur DVD ce petit film inconnu, acquis pour compléter une commande, du non moins inconnu Maurice Cam. En scrutant un peu la filmographie de ce réalisateur qui n’a pas laissé grandes traces, on s’aperçoit qu’il s’était spécialisé dans des comédies de quatorzième rang qui, grâce à de tout petits prétextes dramatiques ou policiers, présentaient des vedettes de la chanson sur le grand écran (Tino Rossi, Alibert ou Charles Trénet) ou des numéros de music-hall aussi variés que roublards.
Métropolitain m’a été plutôt bonne surprise, grâce à une intrigue ingénieuse et plutôt bien filmée, sans doute parce que je n’en attendais pas grand chose, sûrement aussi parce que le Paris de 1938 m’intéresse (et donc que je ne conseillerais pas évidemment pas le film à qui n’a pas une tendresse particulière pour la ville et l’époque).Mais pour qui est attiré par ces images d’un monde révolu, Métropolitain n’est pas mal du tout. Une trame classique de mélodrame populiste, un brave type, ouvrier cariste dans un chantier parisien de débardage, Pierre Carnaux (Albert Préjean) est marié à Suzanne (Anne Laurens), gentille standardiste de nuit dans un grand hôtel (l‘Astoria, alors sur les Champs-Élysées). Alors qu’il se rend à son travail, un matin, en métro aérien, il aperçoit, par la fenêtre un homme qui parait assassiner une femme. C’est, en fait, un prestidigitateur, Zoltini (André Brulé), qui répète avec sa partenaire Viviane (Ginette Leclerc), mais qui, dans la dèche, va faire croire au brave Pierre qu’il allait tuer sa compagne avant de se suicider.
De ces prémisses un peu acrobatiques vont découler des aventures de plus en plus dramatiques qui aboutiront, dans la dernière séquence, au véritable assassinat de Viviane par Zoltini, qui boucle ainsi un maillon fatidique.
Entre-temps, Pierre, séduit par cette belle garce de Viviane, aura mis en péril son couple, aura été joué, et même ridiculisé lors d’une soirée d’artistes où il s’est trouvé trop à l’aise, cru qu’il avait tué Zoltini au cours d’une bagarre pour la possession de la femme, mais aura heureusement retrouvé, après son escapade, la douceur conjugale. C’est extrêmement moral et tout à fait dans le style des mélodrames populaires qui enchantaient les spectateurs des salles de quartier.
Dit comme cela, ça paraît sûrement assez niais ; ça ne l’est pas tout à fait parce que le récit est bien balancé, que les péripéties arrivent à l’heure et sont suffisamment inattendues pour retenir l’attention. Parce que Ginette Leclerc exhale son charme vénéneux avec le naturel qu’on lui connaît. Mais aussi parce que Maurice Cam filme l’histoire, finalement assez noire, avec inventivité et un certain talent, multipliant les angles originaux, les éclairages troubles, les ombres inquiétantes.
Ah ! Pour les bizarres (dont je suis) qui cherchent la petite bête, il faut s’étonner que le brave Pierre, qui habite rue Custine et prend son métro à la station Anvers, sur la ligne 2 (Nation/Étoile par Barbès) emprunte ensuite la ligne 6 (Nation/Étoile par Denfert) où il voit le (faux) crime à proximité de la station Pasteur, pour se rendre à son chantier qui est sur le quai de Bercy. Pour ceux qui ne connaissent pas la Capitale, cela équivaut, pour quelqu’un qui habite dans le Nord de Paris, à passer par l’Ouest pour se rendre dans le Sud-Est. Mais bast ! Ça ne gâche pas la bonne impression…