Je promets que j’ai regardé Goha avec un grand esprit d’ouverture, alors même que je m’étais bien enquiquiné, il y a quelques mois, en revoyant La Poupée, du même Jacques Baratier, qui n’a guère laissé de trace qu’avec Dragées au poivre, salmigondis décevant et qui a été édité dans un coffret triple avec un certain luxe.
Et à dire vrai, si Goha s’était contenté d’une durée bien plus brève, se confinant dans le confort d’un court ou, à la rigueur, d’un moyen métrage, j’aurais été tenté par l’indulgence, un peu comme l’instituteur qui met une note d’encouragement à un élève limité pour récompenser ses efforts et son bon esprit. Le malheur est que le film dure 1h30, ce qui n’est pas considérable, quand c’est bien, mais qui est insupportable quand ça patauge.
Comme Baratier était ce qu’on appelait un cinéaste engagé, vibrant telle une gazelle enamourée aux indépendances nord-africaines, il a tourné Goha, qui est une sorte de conte oriental mou, en deux versions, française et tunisienne sous-titrée (qui n’ont d’ailleurs pas exactement la même présentation, mais je n’ai pas le courage de relater les minimes différences). Ceci n’est pas tout à fait dépourvu d’intérêt et on peut trouver un peu d’agrément dans l’exotisme – à nos oreilles – de la langue arabe, même si le doublage des acteurs français (essentiellement Daniel Emilfork) est très sommaire.
Les lieux où se déroulent les minces péripéties du film sont assez photogéniques et permettent quelques images réussies, les murs blanchis à la chaux des casbahs offrant un contraste agréable avec les vêtements bariolés des indigènes. Il y a une petite curiosité de découvrir, dans leurs premières apparitions au cinéma, Omar Sharif et Claudia Cardinale ; lui dans le rôle principal, elle en silhouette très secondaire. Et, à dire vrai, rien ne permet de supposer qu’ils deviendront, l’un et l’autre, des vedettes internationales.
Surtout on s’ennuie férocement dans un récit évanescent, d’une lenteur agaçante par son manque de substance.
Il se peut que je sois injuste, écrivant cela. Goha a été tiré d’un roman directement écrit en français par deux écrivains, Albert Adès et Albert Josipovici, l’un Égyptien, l’autre Roumain, Cairotes tous deux et adapté par Georges Schehadé, Libanais francophone. C’est dire si l’empreinte de l’Orient, de son rapport différent au temps qui passe, de son goût de l’image poétique y est fort. On y adhère ou non.
Admettons donc que je n’ai pas marché dans cette histoire qui pourrait être extraite des Mille et une nuits, mais une nuit sous gardénal, ce qui ne rend pas la chose bien troublante…