Quelle blague !
Dieu sait si dans ma longue vie de cinéphage j’ai vu des films médiocres de réalisateurs notoires ! Même les plus grands, Huston, Duvivier, Clouzot, Risi, ont commis des bêtises ou des trucs très pâles (à mes yeux, il n’y a que Kubrick qui se soit toujours tenu au plus haut, mais il est vrai qu’il n’a réalisé que 13 films) et comme Hitchcock n’est pas de ce niveau supérieur, ça donne un Rideau déchiré qui est un véritable lambeau d’inanité.
Que je dise tout de suite que le 1 de commisération dont j’affuble le film n’est dû qu’à la présence en haut de l’affiche de Paul Newman (un peu) et de Julie Andrews (surtout).
Quand au cours de mon visionnage je trouvais que le film devenait par trop rasoir ou risible (ou les deux), je regardais la physionomie avenante de l’un ou l’autre acteur, heureusement fort présents et j’attendais patiemment que ça avance. Et je dois dire que j’ai bien souvent été à deux doigts d’arrêter le DVD avant sa fin, tant le happy end était prévisible. Mais cette manœuvre de dernier secours ne m’aurait pas permis la franche rigolade sarcastique surgie lors du transbordement et du sauvetage final des deux héros signalés à la vindicte est-allemande par une danseuse étoile hystérique.
Ce n’est pas non plus la première fois que des acteurs de qualité se font piéger par le renom d’un cinéaste ; mais je suis ravi d’avoir appris que Paul Newman s’est sévèrement disputé avec son metteur en scène, jugeant à juste titre invraisemblable la scène de l’assassinat du VoPo Gromek (Wolfgang Kieling) où, assisté par une fermière, il tire la tête du policier dans le four béant d’une cuisinière à gaz. J’ai vu beaucoup de films d’horreur et d’épouvante dans ma vie et bon nombre d’entre eux présentent des meurtres souvent ingénieux mais quelquefois, et assez souvent, grotesques ; mais je ne me souviens pas d’avoir conservé, dans ma nomenclature mémorielle, quelque chose d’aussi tiré par les cheveux et, pour ainsi dire, d’aussi idiot..
D’ailleurs tout le film est idiot : le scénario est infantile de ce physicien étasunien qui fait mine de passer à l’Est pour, en fait, piquer des secrets à un de ses homologues, savant berlinois, cache ça à sa fiancée, bénéficie, en plein cœur de l’ancienne RDA de l’aide et du concours d’une puissante organisation d’exfiltration et s’enfuit de façon rocambolesque dans un pseudo car de voyageurs (séquence interminable où Hitchcock s’adonne à sa manie des transparences). Et puis, dans un État aussi totalitaire que le fut la RDA (regarder La vie des autres, si on n’est pas au courant), voir nos personnages se faufiler à peu près partout, prendre des escaliers dérobés, trouver partout des complicités n’a pas de sens.
Il me reste à voir de mon coffret, trois films d’Hitchcock : L’étau, Frenzy et Complot de famille : qu’est-ce qui va se passer ? Petit sursaut ou suite de la dégringolade ?