Florilège des révérences et des amitiés de Michel Déon, le livre se dévore comme un roman et on ne l’a pas sitôt terminé qu’on souhaite le reprendre…
Composé autour des îles où Déon a vécu, Corse, Irlande, Spetsai, Mes arches de Noé est le livre de l’amour des pays et des êtres, tout bruissant d’allégresse et de douces nostalgies. Au détour des pages et sans souci de chronologie apparaissent pêle-mêle Kléber Haedens, Paul Morand, Jean Cocteau, Charles Maurras, le président Salazar et bien d’autres figures inconnues et prenantes, qui semblent sortir du Jeune homme vert. Au fil des voyages et des villégiatures, Déon égrène les souvenirs d’une vie tendre et bien remplie.
Tout cela est écrit dans une belle langue, d’un classicisme ensoleillé. Des touches sereines, paisibles qui font revivre Madère, le Portugal, la Grèce de Mycènes ou des îles, l’Irlande du comté de Galway mieux que vingt ouvrages touristiques savants. Un trait, un mot qui dépeignent si parfaitement une atmosphère, une soirée douce de fin d’été que l’on jurerait être l’un des convives…
Peu d’anecdotes pittoresques pourtant, et aucune aventure extraordinaire, mais le défilement des jours ressentis chacun comme une plénitude. Privilège du talent de reconstituer, pour les générations qui ne les ont pas vécues des années achevées, avec leurs sourires éteints et leurs printemps consumés. Cette qualité du regard, cette volonté de transmettre tout ce qui combat doucement la mort (selon la belle formule du Prière d’insérer) donnent un livre de charme et de grâce…