Pomponné.
Je n’ai aucun souvenir du roman originel de Stanislaw Lem, pourtant lu au moment où je dévorais avec acharnement de la science-fiction et qui est encore dans ma bibliothèque ; cet appétit féroce a dû me le faire avaler trop vite, afin que je puisse passer à un autre bouquin de la pile, Robert Silverberg, J.G. Ballard ou Philip-José Farmer. La façon dont ses lecteurs en parlent me donne envie de m’y replonger, ce qui me permettrait peut-être d’effacer la piètre impression que Soderbergh vient de me donner de Solaris. (Je précise évidemment que je n’ai pas vu la version de Andrei Tarkovsky sûrement plus ambitieuse mais, à ce que j’en lis, tout autant infidèle au livre).
Donc Solaris de Soderbergh, vu tout à l’heure. Je précise d’emblée que ce n’est pas le récent mariage de George Clooney qui m’a incité de glisser le DVD dans mon lecteur, mais l’envie de voir un peu d’espace interstellaire. Et sur ce point, je n’ai pas trop été déçu : ça m’a fait songer à une imitation fauchée et sans inventivité aucune de 2001 ; mais comme je sais que Kubrick est inimitable et inatteignable, je me suis dit que l’hommage qui lui était rendu dans cette sorte d’humble copie n’était pas antipathique. Pourtant la copie devient, à la fin, bien trop insistante et s’apparente au pastiche, aux moments où Chris Kelvin (Clooney, donc), emmailloté dans son scaphandre et filmé comme l’est Dave (Keir Dullea) se retrouve nez à nez avec un enfant, ce qui fait naturellement penser à la régression fœtale du film de Kubrick.
Puis j’ai trouvé assez belles les images de la planète Solaris que l’on aperçoit par les hublots de la station spatiale, une sorte de bouillonnement irisé ; comme la modestie n’est pas mon fort et que je ne déteste pas exhiber mes références littéraires, j’ai songé à cette belle phrase d’André Gide, dans Le voyage d’Urien : Des éclairs silencieux palpitent au bord du ciel.
Il me semble avoir dit tout le bien, très mitigé, qu’on peut penser de ce pensum lourd, lent (malgré une durée honnête d’à peine plus d’une heure et demie), prétentieux, mélodramatique, larmoyant, répétitif et d’une terrifiante vacuité.
À ce que j’en lis, les intentions de Lem étaient très au delà de ce que Soderbergh a tourné et celui-ci n’a pas même essayé de balbutier quoi que ce soit sur le sujet proposé qui est la défaite de la science devant ce qui la dépasse. Mais, même en effleurant d’assez loin l’ambitieuse vision de Lem, sans doute difficile à adapter à l’écran, Soderbergh avait sûrement matière, sur une trame vague, de poser quelques questions. Et rien du tout. C’est impalpable, alors que ça devrait être profond, superficiel et chichiteux alors que ça devrait être grave et élégant.
Qui incriminer, sinon Soderbergh ? Clooney fait honnêtement le petit boulot qui lui est demandé et sa partenaire Rheya (Natascha McElhone), malgré un nez trop long, n’est pas plus mauvaise qu’une autre. Mais enfin, sauf talent exceptionnel, le cinéma, c’est d’abord une histoire ; puis une histoire ; et enfin une histoire…