Thérèse

film-therese1Pesanteur de la Grâce.

Bien sûr que les miracles existent. Comment expliquer autrement que Thérèse ait reçu le Prix du Jury, à Cannes et – surtout ! – six Césars, habituellement peu voués à ce type de thèmes ? Que ce film grave, mais jamais sévère soit parvenu à faire passer avec une qualité rare le questionnement sur ce qu’est la clôture, l’enfermement librement choisi et même passionnément souhaité par des milliers d’hommes et de femmes ?

 C’est un film à ne pas recommander à qui ne se pose pas de question sur les mystères de la vocation et de la grâce, de la spiritualité et du mysticisme : ça ne demande absolument pas d’avoir la Foi en quoi ou en qui que ce soit, mais de se demander pourquoi certains en sont brûlés.

therese5On est tombées sur la tête ! On en pince pour un type qui est mort il y a deux mille ans. On n’est même pas sûres qu’il a existé. Ce que dit la jeune sœur Lucie (Hélène Alexandridis) à Thérèse (Catherine Mouchet) nous fait buter sur l’apparent scandale de ce retrait total du monde et des aspects les plus visiblement choquants de la clôture : au delà de la règle monastique de pauvreté/chasteté/obéissance, il y a les cellules sans chauffage, les mortifications et les jeûnes, l’humilité absolue, le confinement, l’abandon de presque tous les liens avec la famille… Une vie entière hors de la société, dans ce qui peut sembler être la parfaite inutilité de la prière continue et de l’adoration perpétuelle. Seigneur, votre amour est féroce ! gémit Louis Martin (Jean Pélégri), qui a déjà vu ses filles aînées partir pour le Carmel et qui ne peut résister à la volonté de Thérèse : Donner ses filles à Dieu, c’est un honneur, ce n’est pas un bonheur…

thereseAh, je le concède, c’est rude et difficile à admettre. Et si la règle du Carmel a été adoucie depuis le Concile, j’ai encore le souvenir d’une de mes cousines à Sens, qu’on ne pouvait rencontrer que séparé d’elle par une grille et en présence d’une religieuse tierce qui avait pour mission d’empêcher les effusions familiales trop puissantes. Et la joie, le bonheur d’être de cette cousine, tout autant perpétuels et continus… Qu’on me passe cette intervention personnelle.

therese.Le film d’Alain Cavalier est à l’image de son sujet : extrême dénuement extérieur, extrême richesse intérieure. Des plans très nombreux, souvent très brefs, séparés par des fondus au noir. Comme dans les tableaux de Georges de La Tour dont il dit s’être inspiré, le réalisateur ne veut pas que des éléments de décor puissent attirer l’attention au détriment des corps et des visages : il filme donc sur le seul arrière-plan d’un mur gris, simplement animé par quelques variations d’éclairage. Des dialogues à la fois d’une grande simplicité et d’une grande profondeur. Une interprétation impeccable dont aucun des visages n’est pourtant connu et au premier rang, bien sûr, Catherine Mouchet, qui est espiègle, douloureuse, adorable, rayonnante, mais aussi Clémence Massart-Weit, la Prieure du Carmel, d’une dureté de diamant et Hélène Alexandridis, la jeune religieuse Lucie, fascinée par Thérèse, amoureuse, même.

C’est vrai, tout cela nous est incompréhensible. Et alors ? Mais c’est éblouissant, un éblouissement qui peut être incommode et dérangeant.

Thérèse Martin est morte minée de tuberculose le 30 septembre 1897, à 24 ans. Elle a été canonisée en 1925. Elle est Docteur de l’Église depuis 1997 ; un des 35 Docteurs de l’Église, au même rang qu’Augustin d’Hippone, Thomas d’Aquin, Jean de la Croix.

Va comprendre !

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