Sublime beauté
C’est sans doute parce que je place Stanley Kubrick tout en haut de mon Panthéon cinématographique, et sans doute même un peu au delà, sans doute parce que je n’imagine pas de ne pas regarder tous ses films au moins une fois par an, parce que, chez lui, il n’y a que trois catégories de films, chefs-d’œuvre, chefs-d’œuvre exceptionnels et chefs-d’œuvre sublimes que, l’index tremblant et la souris intimidée, je me risque pour la première fois à poser ma contribution sur un de ses films.
Et si je n’avais pas entrepris de laisser une trace de mon admiration sur chacune des oeuvres de ma liste des « Films préférés« , je ne m’y risquerais pas, ou plutôt je serais gêné d’enfiler les évidences que je vais énoncer.
Barry Lyndon est d’une beauté exceptionnelle, une beauté de chaque plan, de chaque image : on pourrait mettre en pause à chaque instant et s’emplir les yeux des tableaux admirables conçus et composés par un peintre au talent extraordinaire, mais un peintre qui joindrait à cet art tous les autres talents. Jamais mieux que là, peut-être on n’a réalisé certains idéaux plaçant le cinéma comme la synthèse et l’achèvement de toutes les autres formes artistiques.
Il n’y a pas une fausse note, pas une erreur de rythme, pas une faille de distribution ; mais peut-être est-ce du fait de cette absolue perfection formelle que Barry Lyndon n’est pas mon Kubrick préféré, peut-être parce que l’émotion ne se fixe pas toujours, tant on est transporté par la performance.
Ah, si, tout de même : l’enterrement du fils de Barry, Ryan O’Neal et Marisa Berenson brisés de souffrance et derrière le corbillard blanc et empanaché, le Révérend Runt (Murray Melvin) psalmodiant, dans le vent mauvais, les versets de l’Écriture.
Rien que pour ça, cette merveille resterait dans l’histoire du cinéma…et comme il y a mille autres images inouïes…
Tous les messages d’amateurs éclairés vont dans le même sens et confortent le point de vue que Barry Lyndon est un film exceptionnel de beauté…
Ensuite…ma foi, cela dépend du goût personne de chacun pour les oeuvres fleuves ; il se trouve que tant en littérature (« La recherche », « Les hommes de bonne volonté », « Les Thibault« ) qu’au cinéma (Autant en emporte le vent, Docteur Jivago, La maman et la putain), j’apprécie tout particulièrement l’abondance, le foisonnement, et quelquefois la lenteur.
D’autres auront plus d’attirance pour la sécheresse, la concision, la nervosité…
Il y a plusieurs demeures dans la Maison du Père…