Atterrant !
De braves gens pour qui j’ai de l’amitié m’avaient dit qu’ils étaient allés voir ce Camping et qu’ils n’avaient pas ri comme ça depuis qu’ils avaient vu Les bronzés. Leur œil était encore humide des larmes de rire qu’ils avaient versées et ils me contaient avec tendresse les hennissements de joie qui parcouraient la salle où ils avaient vu le chef-d’œuvre.
Bienveillant, mais circonspect, j’ai tout de même attendu que Camping sorte en DVD, pour – sans l’acquérir ! – regarder ça avant-hier soir.
Ouh là là, quelle catastrophe ! Je crains que mes braves amis soient gens qui ne regardent plus un film depuis trente ans, se repaissant de Navarro et du truc dont je ne sais plus le nom avec Véronique Genest, ex-actrice reconvertie dans le feuilleton télévisé. En d’autres termes, si gentils qu’ils sont, leur jugement a été empuanti par vingt ans de téléfilms saumâtres, et ils pensent sérieusement que Michaël Youn, Isabelle Mergault, Laurent Baffie et tout le toutim sont des cinéastes puisqu’ils passent à la télé (et que c’est à peu près pareil).
Pourtant, bon apôtre, plutôt enclin à l’indulgence ce soir-là, après un bon dîner, un ballon de cognac notable congrûment chauffé dans ma paume accueillante, je m’étais assis sans déplaisir devant ce que j’imaginais être, comme on me l’avait dit, une mouture moderne de ces Bronzés que je défendrai toujours, inguine et rostro, (en français : « bec et ongles » !) contre les ennuyeux qui prétendraient les attaquer.
L’idée n’était pas absurde de faire rire gentiment, devant les mésaventures d’un chirurgien esthétique (Gérard Lanvin) malencontreusement contraint de faire étape quelques jours au milieu du petit peuple d’un camping aquitain. Il y avait de quoi faire rire de l’un et des autres, avec ou sans méchanceté, pour conclure, finalement, comme le disait la chanson d’Avant-Guerre, que Et tout ça, ça fait d’excellents Français…
Et j’ai vu… mais qu’ai-je vu au juste, que puis-je me rappeler de 90 minutes totalement insignifiantes, où des acteurs qui furent (Claude Brasseur) ou qui sont (Mathilde Seigner) de bons, d’excellents acteurs, se traînent indignement sous la conduite d’un gugusse ridicule (Frantz Dubosc) qui se donne beaucoup de mal pour arriver au demi-orteil du Popeye des Bronzés (Thiérry Lhermitte) et n’y pas parvenir ? Il n’y a rien, pas une idée, pas une observation fine, pas un de ces brins de mélancolie qui s’imposent dans ce genre de film…
Même si je n’ai ni de goût ni pour Boisset, ni pour son Dupont-Lajoie, la sociologie d’un camping m’y semble mille fois plus véridique…et plus drôle… (avant l’intervention de la tragédie).