Voilà un charmant petit film musical, un peu fauché, assez mièvre et plein de bons sentiments, mais c’est l’époque – 1942 – qui veut ça : devant une réalité qui n’est pas très reluisante, autant faire rêver la jeunesse (Premier rendez-vous d’Henri Decoin est bâti également sur cette eau sucrée).
Mais la jeunesse qui a vingt ans, pendant l’Occupation, est née au lendemain de la Première guerre, et elle ne fait pas qu’écouter Maréchal, nous voilà ! célébré par la voix de ténor léger d’André Dassary, ni même La chanson des blés d’or ou La romance de Maître Pathelin : la jeunesse est swing depuis Charles Trénet et, si elle est un peu plus provocante, elle peut même être zazou et entrer dans la Résistance passive, comme on disait, arborant vestons et cheveux exagérément longs, en contravention avec les préceptes du régime de Vichy.On n’en est pas là, dans Mademoiselle Swing, qui ne voit pas plus loin que le nez mutin et le petit filet de voix de son héroïne, Irène de Trébert qui épousa d’ailleurs peu après Raymond Legrand, (père – d’un autre lit – du merveilleux compositeur Michel) et qui, dans le film, dirige l’orchestre qui fait se nouer l’intrigue.
Enfin ! Quand j’écris intrigue, il ne faut pas s’attendre à un récit bien passionnant ou bien cohérent, mais à une suite de péripéties sympathiques qui n’ont d’autre raison que de présenter chansons et numéros de music-hall ; il y a eu ainsi avant et après la guerre une grande vogue de ces formations qui mélangeaient musique, danses, gags visuels, numéros de virtuoses, tout cela dans une impeccable bonne humeur, Ray Ventura, Fred Adison, Jacques Hélian, Aimé Barelli et il y a quelques films intéressants à regarder : Nous irons à Paris, Pigalle-Saint-Germain-des-Près ou Les joyeux pèlerins…
Mademoiselle Swing, dont les chansons sont plutôt réussies (notamment Quand viendra le jour…), serait assez bien dans le genre, s’il ne fallait supporter l’insupportable Elvire Popesco, qui roucoule et rocaille de façon exaspérante comme à son habitude, et le bellâtre chanteur de charme Pierre Mingand, riche tête-à-claques à port avantageux (on me souffle qu’il est mort dans la misère noire, après un très grave accident qui l’obligea à quitter la scène ; certes ; qu’il repose en paix ! mais il était bien agaçant). Ça se laisse toutefois voir, si l’on n’est pas trop exigeant sur les vraisemblances et si l’on admet les quiproquos, méprises, coups de théâtre divers qui sont le lot du genre…