La guerre, probablement…
Comme je ne me console pas de la mort d’Ernest Borgnine survenue il y a quelques jours, je me suis passé hier ces Douze salopards que j’avais un peu oubliés. Et à dire vrai, j’aurais mieux fait de choisir autre chose, Les Vikings, plus exotique, ou La horde sauvage, plus profond.
Ce n’est pas mal mené, Les douze salopards, et même assez plaisant, mais je ne suis pas le seul à penser que c’est bien long et que toute la deuxième partie – l’entraînement du commando – pourrait être raccourcie. Et même – iconoclasme ? – que les épisodes du conflit qui oppose le commandant Reisman (Lee Marvin) au colonel Breed (Robert Ryan) sont superflus et hors propos…
Autre reproche : l’identification des Douze est superficielle ; ou, plus exactement, à part quatre ou cinq d’entre eux, on ne les reconnaît pas. Or il me semble que les meilleurs de ce genre de films, dont les protagonistes disparaissent progressivement dans la mort et où ne survivent que quelques rescapés, sont ceux où le spectateur s’est familiarisé, grâce à une longue présentation, avec chacun des caractères. Me revient à l’esprit la belle Révolte des dieux rouges et il faudra que je revoie Les sept mercenaires. Mais il y a sûrement des tas d’autres exemples… Toujours est-il qu’on distingue assez difficilement les individualités, à part celle des quatre ou cinq vedettes, la forte-tête Cassavetes, l’obsédé Savalas, le débile Sutherland et le massif Bronson et que les autres se font descendre sans qu’on éprouve pour eux le petit sursaut d’empathie indispensable.
On a écrit ici et là, sur le fond du film, tout et son contraire : que c’était un farouche brûlot antimilitariste, ou alors que c’était une apologie de pratiques fascistes… On lit ce qu’on veut, bien sûr… Il me semble que Les douze salopards est avant tout un film de guerre, un film sur la vraie pratique de la guerre, de la guerre moderne, en tout cas, qui n’est pas une partie chevaleresque qui compte pour du beurre, mais un moment où les ennemis sont vraiment les ennemis, où l’on doit en tuer le maximum, par tous les moyens possibles, y compris les moins glorieux (les Allemands – et Allemandes… et s’il y avait des enfants ce serait pareil – piégés comme des rats et explosés par les grenades et l’ammonium). Et la guerre est aussi un moment où la démocratie, le consensus, l’écoute, le respect de l’opinion de chacun doivent disparaître au bénéfice de la discipline absolue, de l’autorité sans faille, de l’exécution sans discussion.
Ça décoiffe un peu, ça. Et il n’est pourtant jamais mauvais que ce soit rappelé…
Ah, au fait, Ernest, repose en paix !