Le plus sublime des Dracula
Le premier et le plus beau, le plus novateur, le plus séduisant et le plus terrifiant des Dracula de la Hammer.
Quel dommage que l’édition DVD soit si piètre ! Pas un bonus, si ce n’est la bande-annonce, alors que de longues gloses de spécialistes sur le mythe de Dracula, sur les films de la Hammer, sur Christopher Lee auraient été des régals !
Enfin ! Il nous reste la sublime contre-plongée sur le Comte, assoiffé de désir, du haut de l’escalier monumental…
Le mythe du Vampire est-il celui d’une société de pulsions contrariées ou bridées ? Un de ces jours, il faudra qu’on me dise deux mots d’une société où les pulsions pourraient être assouvies ! C’est le principe même de la société civilisée que de mâter les pulsions ; sinon, on revient tout simplement à « L’aube de l’Humanité » (voir le prologue de 2001 : l’Odyssée de l’espace) : ta gueule me déplaît, je te tue, ta femme me plaît, je te la prends… Disons simplement que le Victorianisme a mis sous l’étouffoir sur la pulsion sexuelle, mais, par exemple, elle a largement libéré la pulsion financière… et l’on pourrait chercher bien d’autres exemples…
Pour en revenir au film admirable de Terence Fisher, ses effets spéciaux pourront évidemment paraître ridicules aux bambins nés sous l’empire de Star Wars et plus encore à ceux qui ont sucé le lait de la cinéphagie avec le numérique du Seigneur des Anneaux ; et il faut bien que je reconnaisse que la pulvérisation du Comte, sous l’effet du soleil levant, n’est pas terrible, est même, à mes yeux pourtant complices, un peu ridicule… et quand les chauve-souris volettent, manifestement mues par des élastiques et/ou des fils de fer, c’est un peu pareil… Mais bon… c’est la loi du genre…
En revanche quelle maîtrise dans la mise en scène de nos terreurs : Jonathan Harker (John Van Eyssen) coincé dans la crypte levant les yeux sur Dracula, pris encore une fois en contre-plongée, qui referme lentement la porte derrière lui… et l’apparition du Comte dans la chambre de Mina…et le corbillard aux chevaux empanachés de noir jaillissant du château…
Et une mention spéciale à la musique de James Bernard, d’un classicisme grandiloquent et éprouvé, soulignant sans fausse pudeur nos chocottes !
Pas seulement un film de genre : un film d’un romantisme assumé grandiose…