Un couple épatant

Le maillon faible.

J’ai déjà notablement glosé sur l’intérêt exceptionnel de la Trilogie de Lucas Belvaux, Un couple épatant/Cavale/Après la vie, que l’on peut voir dans l’ordre que l’on veut, ou en faisant confiance au hasard, puisque les histoires racontées s’entrecroisent, se chevauchent, s’entrecoupent de façon si intelligente et si habile qu’on peut les aborder par n’importe quel biais. Ce sont des histoires parallèles qui parviennent à se toucher. Je sais l’apparente absurdité de la comparaison, mais je note que c’est exactement ce qui nous arrive tous les jours : on se côtoie dans le métro ; on se salue d’un Bonjour indifférent au bureau avec des quasi-inconnus ; on échange trois mots aimables avec ses voisins de palier : et qu’est-ce qui se passe après, pour les autres ?

Bon, je me suis suffisamment exprimé là-dessus en commentant les deux autres films, notamment Cavale, le meilleur des trois, traité comme un thriller. Est-ce parce que c’est une comédie qu’Un couple épatant est le plus faible des volets ? Ou bien parce que c’est celui dont les personnages paraissent les moins substantiels, les plus dessinés à gros traits ? Ou encore parce que le genre de la comédie est un des plus ardu à réussir surtout lorsque, comme c’est le cas ici, il ne s’appuie pas sur un dialogue étincelant de mots d’esprit, de rosseries ou de calembours.

couple 3Alain (François Morel) dirige un bureau d’études de haute technologie très prospère ; son assistante, Claire (Valérie Mairesse) lui est toute dévouée et il a plein d’amis charmants. Père de deux grands enfants, il est mariée à une ravissante Cécile (Ornella Mutti), professeur de Lettres au principal lycée de la ville. Son hypocondrie – et sans doute un brin de surmenage – va le conduire à imaginer que son entourage entier, femme, enfants, secrétaire, amis veut sa perte et sa disparition. Et son histoire, celle d’un type un peu dépressif, un peu paranoïaque, va croiser celles, bien plus dramatique, de deux professeurs collègues de sa femme, Agnès (Dominique Blanc) et Jeanne (Catherine Frot) : l’une et l’autre sont personnages principales de Cavale (Jeanne) et de Après la vie (Agnès).

Seulement les interpénétrations entre les vies, qui fonctionnent admirablement bien entre ces deux derniers films, ont du mal à se cheviller ici aussi bien et on assiste à une course un peu burlesque des protagonistes, qui ne parvient pas vraiment à retenir l’intérêt. Certes, de temps en temps, les histoires des deux autres films – qui partagent le même espace et se déroulent simultanément – rejoignent ce Couple épatant et viennent s’entremêler à lui, mais on perçoit là l’artifice, ce qui n’est pas du tout le cas pour Cavale et Après la vie, dont la marqueterie est impeccable.

Cela dit, il me semble aller de soi qu’il est nécessaire de regarder la Trilogie dans son entier, et, si possible, en continuité pour avoir une vision exacte de ce que qu’a voulu Lucas Belvaux. Et de ce qu’il a parfaitement réussi, nonobstant ce que je viens d’écrire.

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