Rose bonbon.
Il y a deux choses intéressantes dans The Mist : l’inventive variété des monstres et l’absolue désespérance de la fin. Cela étant, est-ce que ça justifie l’assez banale dispersion sur deux heures de temps d’une assez banale histoire ? Sans doute oui, si on a un bout d’après-midi paresseuse à passer et un goût prononcé pour les films d’angoisse ; sans doute non si on ne dispose que d’un temps limité et si on n’est pas attiré par les brutalités sanguinolentes.
Mon appréciation est intermédiaire et ce n’est sûrement pas quelque chose que je reverrai : même les séquences les plus violentes où des bestioles chitineuses et monstrueuses attaquent les malheureux humains rassemblés dans un supermarché ne sont pas de celles dont on conserve un souvenir poignant et anxiogène : c’est de la belle ouvrage d’artisan consciencieux, qui sait à quel moment l’ignominie doit frapper, pour maintenir l’attention du spectateur, et qui elle doit frapper, pour susciter son empathie. C’est bien fait et, je le répète, la variété des horreurs dégoûtantes qui en veulent à nos congénères est un bon point : il y en a de toutes petites et d’immenses, des volantes, des grouillantes et des rampantes, des qui font trembler la terre par la lourdeur de leur pas, des qui vous lancent à la figure des sortes de filaments vénéneux et brûlants, des avec tentacules et des avec mandibules, des qui ressemblent à des ptérodactyles, des qui ressemblent à des perroquets (tout au moins par leur bec).
En revanche la cristallisation vers l’hystérie collective doloriste prêchée par une évangéliste cinglée, qui finit par fédérer autour de sa vision apocalyptique une bonne partie des reclus ne m’a pas convaincu. Des maniaques de ce type, qui voient dans la punition sanglante et dans l’expiation masochiste le chemin d’un improbable Salut, il y en a bon nombre dans le cinéma étasunien du fait du foisonnement irrépressible des sectes réformées. Me vient à l’esprit, par exemple, la mère (Piper Laurie) de Carrie : frustration et haine de soi. On n’est pas vraiment impressionné par cette névrosée, dont la personnalité et le discours ne sont pas à la mesure des horreurs qu’elle va susciter.
Mais la fin, c’est vrai, quelle sécheresse terrifiante, irrémédiable ! On ne va pas la raconter, pour laisser à ceux qui auraient l’imprudence ou l’inconscience de voir le film, le bénéfice d’une secousse intelligente. Ces dix dernières minutes valent la peine. L’ennui c’est qu’elles sont bien tardives.