À mort l’arbitre

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Foutraque

Comment se fait-il que, devant filmer un sujet aussi original et actuel, bénéficiant de l’intéressant apport d’une galerie de tronches débiles aussi spectaculaires et des immeubles monumentaux et terrifiants que Riccardo Boffil a construits à l’ouest de Marne-la-Vallée, comment se fait-il que ce barbouilleur de Jean-Pierre Mocky puisse rater à un point pareil un film qui aurait pu être une plongée au couteau dans le monde trouble et désespérant des supporters de football ?

Sans doute faut-il mettre cette bouillie indigeste (mais fascinante) entièrement sur le compte d’un réalisateur je-m’en-foutiste, flemmard et imbu de lui-même à un point tel que sa misanthropie croissante et son autocélébration perpétuelle ont peu à peu refroidi tous ceux – dont je suis – qui au vu des Dragueurs, de Un drôle de paroissien, et jusqu’à L’étalon lui accordaient quelque crédit, sans être jamais entièrement dupes.

a-mort-l-arbitre-1984-01-gCar enfin, alors qu’un passionnant championnat d’Europe de football se déroule, ce n’était pas une mauvaise idée d’une chaîne de la TNT de programmer un film qui met en scène la bêtise veule de supporters cinglés. Caricaturaux ? Pas tant que ça ! Il y a dix ans, lors de la Coupe du Monde, lors d’un match, à Lens, un gendarme mobile, qui gardait paisiblement les véhicules de son unité a été agressé, matraqué, laissé pour mort et porte depuis lors de lourds handicaps ; treize ans avant, c’était le Heysel ; fin 2006, la mort d’un fan du PSG après un match contre Hapoël Tel-Aviv ; et on ne voit pas comment ça pourra ne pas croître et embellir.

Mais Mocky se croit toujours plus malin que tout le monde, estime qu’on peut filmer n’importe comment, au mépris de toute cohérence, qu’un film n’a pas à avoir de rythme réfléchi, qu’un grand acteur, comme Michel Serrault n’a pas besoin d’être dirigé ! Et justement c’est le contraire ! Si Serrault n’avait tourné que des films de Mocky, avec qui il était lié par une complicité bizarre, que conserverait-on de lui, dont le côté fantasque et démesuré avait précisément besoin d’être cadré, canalisé, contenu !

Dans A mort l’arbitre, la plupart des acteurs jouent terriblement faux, Serrault bien sûr, mais aussi Eddy Mitchell (que Tavernier a su si bien utiliser dans Coup de torchon), ou Claude Brosset ; et Mocky lui-même, dans le rôle de l’inspecteur de police anarchiste, amer, détaché est pire que tout le monde…

Le film sur la haine brutale, congénitale et avinée reste à faire…

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