Barrabas

Qu’est-ce qu’un péplum ?

Je suis bien en peine de placer une note qui corresponde à ce que j’ai vraiment ressenti : si Barabbas est un péplum, avec les rites obligés du genre, les moments de bravoure, les regards farouches, les images impressionnantes, les déchaînements des foules, la musique héroïcisante, les muscles huilés, la sauvagerie des spectateurs des jeux du cirque, ce n’est pas mal, ça mérite une bonne appréciation, sans atteindre toutefois les sommets du genre, bien loin de Ben-Hur qui me semble être peu surpassable.

Et si c’est une réflexion sur l’angoisse qui peut frapper un être simple, fruste, sommaire qui, par la suite des circonstances et par une suite de hasards s’approche très prêt du mystère de La plus grande histoire jamais contée et qui dans la suite de sa vie va s’interroger sur ce qui lui est arrivé et sur le dessein qui lui est assigné par ce qui le dépasse, c’est encore mieux : j’ai rarement assisté à une réflexion plus intelligente sur ce qui a pu arriver à ces contemporains du Christ qui ont eu l’étrange aventure d’être temporellement situés aux moments même de sa vie terrestre sans bien y comprendre quoi que ce soit (les Actes des Apôtres fourmillent de ces sidérations).

Le malheur est que la juxtaposition de ces deux données – le caractère spectaculaire et exalté des péplums de la bonne époque/la réflexion très conceptuelle sur le poids singulier de la proximité chronologique et de la culpabilité faussement ressentie par Barabbas – ne fait pas un film très convaincant.

Ce n’est la faute de personne : même si je trouve que Vittorio Gassman n’est pas idéalement distribué en candidat au martyre, parce que son physique (ou l’habitude qu’on a de le voir en d’autres rôles moins iréniques) ne convient pas très bien, il y a de très bons acteurs, de très belles scènes et le minimum que l’on peut attendre d’un excellent réalisateur, Richard Fleischer. Et, comme on l’a beaucoup et excellemment remarqué, le personnage de Barabbas nourrit plein de complexités.

Mais je ne suis pas sûr du tout qu’on puisse faire coexister un genre qui se nourrit aussi d’une certaine naïveté pleine de charme et d’intensité avec des préoccupations à la philosophie un peu davantage ambitieuse.

Cela dit Anthony Quinn est très bien ; il a rarement été mauvais, ayant à peu près abordé tous les genres et les ayant à peu près tous illustrés. Mais ce n’est tout de même pas suffisant, même si les images finales sont très belles tant on voit Barabbas s’approcher enfin de tout près de ce qu’il va découvrir…

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