Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Le petit arpent du Bon Dieu

lundi, janvier 13th, 2025

Misères du Sud profond.

Le roman d’Erskine Caldwell, publié en 1933, dans les plus chaudes heures de la Grande dépression (comme, un peu plus tard (1939), Les raisins de la colère de John Steinbeck dont l’adaptation par John Ford date de 1940) fut un immense succès public. On évoque le chiffre de 40 millions d’exemplaires vendus. Succès de scandales, qui a horrifié les Ligues de vertu, mais aussi, et bien entendu, fascination du public pour le monde de violence, de brutalité, de crasse, de sexualité décrit sans retenue : un abîme s’ouvre mais il rejoint la sensation que les habitants des États-Unis, qui voguaient depuis la fin de la guerre de 14 dans des flots de prospérité paradisiaque sont, par la survenue du Jeudi noir du 24 octobre 1929 dans les pires cercles de l’Enfer. (suite…)

En effeuillant la marguerite

mercredi, janvier 1st, 2025

Ce soir les jupons volent !

En général, la médiocrité de Marc Allégret ne fait de doute pour personne. D’abord giton d’André Gide lors de son voyage au Congo, ce fils de pasteur protestant a pourtant filmé quelques trucs satisfaisants : Entrée des artistes (1938), Félicie Nanteuil(1945), Blanche Fury (1948)… Mais il s’est éteint au fur et à mesure que l’étoile de son cadet Yves, auteur de plusieurs grands ou très grands films, Dédée d’Anvers (1947), Une si jolie petite plage (1949), Manèges (1951), Les miracles n’ont lieu qu’une fois (1951). Mais lui et l’autre ont connu des fins de carrière moins brillantes, effacés, étouffés par la hargne cannibale de la Nouvelle Vague. (suite…)

La femme du prêtre

vendredi, décembre 27th, 2024

Et maintenant, on va où ?

Je craignais que cette histoire d’amour très simple entre un prêtre fervent, pieux et droit et une ancienne chanteuse de variété qui a largement fait basculer sa vertu par dessus les moulins ne soit qu’acide, sarcastique, plutôt cruelle et méchamment moqueuse. Car s’il est un sujet qui fait ricaner jusqu’à plus soif les neuneus de la Libre pensée et les sectaires de la Ligue des Droits de l’Homme, c’est bien le célibat ecclésiastique. D’où leur jouissance malsaine quand sont révélées les nombreuses histoires de touche-pipi exposées avec volupté dans toute la presse ; comme si ce n’était pas le cas dans le corps enseignant, chez les animateurs de colonies de vacances et – bien entendu et c’est tellement pire ! – dans le secret des familles. (suite…)

Callaghan remet ça

samedi, décembre 21st, 2024

Ploum ploum tralala !

Tout finit bien puisque tout finit a écrit le grand Jacques Chardonne. La formule, si belle et si exacte s’appliquait naturellement à autre chose qu’à une série minable de films fauchés des années 50, mais elle leur convient pourtant bien. Après l’ultime opus, qui est donc Callaghan remet ça, les producteurs ont dû juger que les résultats financiers s’effritaient et que la chute du nombre des spectateurs dans les salles ne donnait pas envie de remettre cent sous dans la machine. Donc, fin finale de l’incarnation du numéro 2 des aventuriers créés par Peter Cheyney.

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Et par ici la sortie

dimanche, décembre 15th, 2024

On voit le bout.

Pénultième œuvrette de la tétralogie filmée des aventures de Slim Callaghan, voilà que Et par ici la sortie ne vaut pas plus tripette que les deux premiers volumes naguère ici commentés. À dire le vrai, on aimerait disposer d’une possibilité de noter en dessous de zéro des films aussi lamentables ; mais comme on est plutôt bon zigue et que Noël approche, on se dit que ça a pu permettre d’assurer des fins de mois un peu plus rutilantes aux acteurs et actrices qui ont tourné ça.

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Plus de whisky pour Callaghan

dimanche, décembre 8th, 2024

Heureusement bref, malheureusement idiot.

Il me semble possible d’apprendre sur une époque tout autant en regardant de très mauvais films qu’en regardant de bons. Et si ça se trouve même, davantage tant on a des perspectives tout ouvertes sur certaines dispositions bizarres de la nature humaine, notamment du mauvais goût des spectateurs d’une époque ; le pire que j’en ai été et je me souviens, presque soixante-dix ans plus tard combien Plus de whisky pour Callaghan avait emballé le môme dévoreur de cinéma que j’étais. Emballé notamment par le jeu de mots terminal dont je vous dirai un mot un peu plus avant si vous avez la faiblesse de me lire.
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À toi de jouer, Callaghan !

mardi, décembre 3rd, 2024

De dixième ordre.

Peu féru de romans policiers et donc guère connaisseur du genre, mais toujours soucieux d’élargir les bornes de ma science, je serais particulièrement reconnaissant à un amateur qui m’expliquerait clairement les différences des personnages issus de la plume fertile de Peter Cheyney (1896 – 1951) c’est-à-dire Lemmy Caution et Slim Callaghan ; différences de caractère, de comportement, de façons de faire qui peuvent exister entre eux, qui sont tous deux des aventuriers, aimant les bagarre, les belles voitures, la vie dorée des palaces, l’un et l’autre étant aimés des femmes plutôt légères et les aimant tout autant. (suite…)

La dérobade

dimanche, novembre 17th, 2024

Les bas-fonds.

Le titre du film, La dérobade, ne me paraît pas absolument convenir à cette histoire forte et effrayante, même s’il est adapté du roman autobiographique de Jeanne Cordelier ; celle-ci, issue de la misère noire et de l’abjection familiale, autodidacte et devenue auteur de renommée internationale a relaté sous un jour presque documentaire la vie de celles qu’on a du mal à nommer filles de joie. On est bien loin de la chaleur endormeuse de La maison Tellier (Le plaisir) de Max Ophuls, de Dédée d’Anvers d’Yves Allégret de La petite de Louis Malle, de la petite entreprise individuelle d’Irma la Douce de Billy Wilder, de Jamais le dimanche de Jules Dassin, même des Nuits de Cabiria de Federico Fellini et plus encore de la perversion sophistiquée de Belle de jour de Luis Buñuel… Et de de tant d’autres films. Dans La dérobade, la prostitution est présentée sous son jour le plus sordide, le plus violent, le plus cruel. (suite…)

Vanya 42ème rue

jeudi, novembre 7th, 2024

Tout finit bien puisque tout finit…

Je ne suis pas féru le moins du monde de théâtre et je ne supporte guère, au cinéma, les adaptations de pièce que lorsque le réalisateur fait virevolter ses comédiens d’un bout à l’autre de l’écran. On a jadis écrit, à propos de Marius ces phrases très éclairantes qui définissent parfaitement ce que je pense : Il y a cette mobilité qui n’appartient qu’au 7ème art qui permet d’être dans la scène et non simplement devant. La caméra « prend du champ » ou, au contraire, « resserre » le plan autour des protagonistes selon les besoins d’intensité dramatique du moment. La lumière, si difficile à maîtriser au théâtre, est ici une alliée « objective » dont la variation subtile est un langage en soi. En d’autres termes, si j’ai beaucoup aimé le Cyrano de Jean-Paul Rappeneau, c’est bien parce c’est aussi vraiment du cinéma. (suite…)

Saint-Omer

mercredi, octobre 23rd, 2024

Juger, c’est refuser de comprendre.

Après avoir tourné bon nombre de documentaires bien-pensants qui ne sont pas tous inintéressants (Nous 2021) généralement consacrés à la douleur de l’exil des Africains en France (mais alors pourquoi ne pas revenir dans le pays dont on est issu ?), Alice Diop a réalisé son premier film en 2022.

Un film adapté d’une malheureuse histoire vraie,  étrange et toujours mystérieuse affaire survenue en novembre 2013 dans la nuit venteuse et sûrement glaciale d’une plage de Berck-sur-mer dans le Pas-de-Calais. (suite…)