Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Main basse sur la ville

vendredi, mai 29th, 2020

La main passe ! Rien ne va plus !

Mystères et grandeurs du cinéma ! Comment Francesco Rosi peut-il pendant une heure et demie nous fasciner et nous retenir sur l’histoire assez banale (assez désespérante, il est vrai aussi) des manipulations, magouilles, coquineries, prévarications et autres corruptions qui ravagent une grande cité, qui la mettent en coupe réglée et qui s’éternisent et s’éterniseront. Il y a un côté intelligemment documentaire sur la façon dont les grands manipulateurs de l’opinion – je veux dire les élus du peuple – se débrouillent toujours pour rouler tout le monde et se succéder aux postes de responsabilité. D’ailleurs même si Rosi penche nettement à gauche, on peut être certain que sous les mandatures communistes qui se sont succédé à Naples (dès 1975 jusqu’à 83 puis entre 1993 et 2000) les crapuleries ne se sont pas interrompues. C’est comme ça ! Le Pouvoir corrompt, on le sait depuis toujours. (suite…)

Le viager

mercredi, mai 27th, 2020

La vie est un long fleuve tranquille.

Si le film ne durait qu’une heure, avait donc le format – rare et baroque – d’un moyen métrage, ce serait un petit bijou à qui rien ne serait à reprocher, si ce n’est le jeu en roue complétement libre de Michel Serrault et de Michel Galabru à qui le réalisateur Pierre Tchernia a laissé la bride sur le cou, s’amusant certainement beaucoup des pitreries de ses acteurs. On sent d’ailleurs que le tournage a été une partie de plaisir entre complices qui n’imaginaient sans doute pas que Le viager rencontrerait un succès aussi étendu et aussi durable. Film qui fait, sûrement sans leur coûter beaucoup, les soirées inusables des chaînes de télévision. (suite…)

L’enfer vert

mardi, mai 26th, 2020

La Vertu, sport dangereux !

Eli Roth, jeune réalisateur roublard et sans scrupule sait assez bien comprendre ce qui peut intéresser l’odieux amateur de carnages et horreurs cinématographiques. Intitulés Hostel et Hostel 2, les deux films qui lui ont donné une grande notoriété dans ce cercle de cinglés (dont je fais partie, naturellement) mettaient en scène une organisation criminelle des méchants Pays de l’Est qui procurait à de riches Américains frustrés l’occasion de satisfaire moyennant un gros matelas de dollars leurs pulsions sadiques sur de braves étudiants un peu niais, un peu crétins attirés dans cette sorte d’enfer par de jolies filles faciles, et qui se retrouvaient émasculés, éventrés, essorillés, démembrés, découpés, etc. par des hommes (ou femmes) d’affaires apparemment tout à fait rangés. Malgré ses imperfections, ce binôme m’avait intéressé parce qu’il mettait tout autant l’orientation sur les bourreaux (et leurs pourvoyeurs) que sur les victimes. (suite…)

Paris est toujours Paris

dimanche, mai 24th, 2020

Ce soir les jupons volent !

Il y a beaucoup de films où le cinéma des États-Unis rend à Paris l’hommage que mérite la plus belle ville du monde, aux temps en tout cas où elle n’était pas abîmée par les fariboles de son Maire actuel (et de son prédécesseur). Il n’y a qu’à citer Moulin Rouge (celui de John Huston, bien. sûr), Gigi de Vincente MinnelliMidnight in Paris de Woody Allen et une bonne dizaine d’autres. Mais je suppose que dans l’ambiguë relation qui nous lie, la Grande-Bretagne a été plus circonspecte ou moins naïve. Et je ne parle pas de l’éternelle Germanie. Mais je n’avais pas idée que la Sœur latine, la belle Italie, dont la capitale est la seule qui puisse être comparée à la nôtre (avec qui elle est liée par un pacte de jumelage exclusif d’ailleurs) ait, elle aussi, rendu son hommage. (suite…)

Evil dead 2

samedi, mai 23rd, 2020

Les inconnus dans la maison.

J’avais assez naguère apprécié Evil dead, ses outrances et ses horreurs (ou, comme on disait jadis ses pompes et ses œuvres, à propos de Satan) et il me semblait que Sam Raimi avait trouvé un angle original pour nous donner la trouille, ce qui est, au demeurant, le but et le souhait de tous ceux qui apprécient ce déplorable genre de l’horreur, parmi qui, bien sûr, je me range, sans fierté mais sans gêne. Regardant les premières images du film et assez déçu par elles je me disais avec quelque jactance satisfaite qu’une de mes vieilles certitudes se trouvait, une fois de plus, confirmée : lorsque le récit ne s’appuie pas sur une histoire ou un mythe structuré, toutes les suites et séquelles, tous les prolongements et développements n’ont pas beaucoup d’intérêt. Et je prenais en exemple quelques films de qualité dont les volumes suivants ont été minables ou inutiles : Le projet Blair witchHellraiser ou The descent. (suite…)

L’Anglaise et le Duc

vendredi, mai 22nd, 2020

Voici le temps des assassins.

Né en 1920, Éric Rohmer avait donc 81 ans lorsqu’il a réalisé L’Anglaise et le Duc en 2001, c’est-à-dire un film dont une partie importante comporte des décors numériques, sans doute volontairement naïfs (un peu comme des images d’Épinal), dont les acteurs essentiels sont – l’Anglaise, Lucy Russell– une parfaite inconnue – et le Duc, Jean-Claude Dreyfus – un acteur de second rôle et qui tient sur la sacro-sainte Révolution française des propos agressifs et délicieusement iconoclastes pour ceux qui pensent comme moi que c’est vraiment la période la plus sombre de notre Histoire. Il est vrai que Rohmer n’a jamais fait du cinéma comme tout le monde et qu’il s’est même permis des audaces assez étranges, qui ne sont pas toujours réussies, d’ailleurs, comme Perceval le Gallois en 1978 ou Les amours d’Astrée et de Céladon tourné alors qu’il avait 87 ans (!) en 2007.

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Le sucre

mercredi, mai 20th, 2020

Les voyageurs de l’impériale.

Je gage que j’aurais bien davantage apprécié Le sucre si j’avais pu goûter à leur véritable mesure tous les trafics, toutes les arnaques, toutes les spéculations, toutes les escroqueries qui sont décrites de façon un peu massive par Jacques Rouffio, le spécialiste des sujets de société bien lourdingues (les mutineries de 1917 dans L’Horizon, les mafias médicales dans Sept morts sur ordonnance). Les virtuosités des polychromes spéculations sont tellement loin de mon paysage mental (je ne suis pas meilleur qu’un autre, je suis seulement peu capable) que les montages subtils, les ressorts psychologiques, les tentations de réaliser de gros gains sans rien faire, sur la seule foi d’un tuyau me laissent bouche bée. Et que, surtout, je ne pige pas tout. Pas du tout tout, si je puis dire.

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Farandole

mardi, mai 19th, 2020

« La Ronde » en minuscule.

Si j’évoque La Ronde du grand Max Ophuls en titre de cet avis, c’est parce que cette assez agréable Farandole en a tout à fait la structure circulaire et s’achève sur le retour dans un même lieu de bon nombre des personnages qu’on aura vu s’entrecroiser pendant toute la durée du film. Chez Ophuls, il est fait explicitement référence à une pièce de théâtre d’Arthur Schnitzler ; le générique de Farandole n’en fait pas mention, indiquant simplement que le scénario a été bâti par André Cayatte et Henri Jeanson. Comme il me semble à la fois démesuré et inutile d’entreprendre là-dessus de savantes recherches, je laisse la question ouverte. (suite…)

Ce qui nous lie

lundi, mai 18th, 2020

Ni flacon, ni ivresse.

Je n’ai pas de particulière prévention contre le cinéma de Cédric Klapisch, qui n’est certainement pas le phare lumineux du cinéma français, mais qui n’est pas non plus sa honte. On peut dire plutôt du bien du Péril jeune, de L’auberge espagnole et de Paris par exemple ; en tout cas on ne s’y ennuie pas. Mais il me semble qu’il a perdu la main et qu’il ne parvient plus à trouver un scénario intéressant, qui lui permette, sans éclat mais sans lourdeur, de poursuivre sa petite entreprise. C’est comme ça, quand il n’y a pas assez de substance ou plutôt de substrat : on épuise vite la terre arable. (suite…)

Love

lundi, mai 18th, 2020

Le Temps détruit tout.

On reproche à Gaspar Noé, souvent avec pertinence, une myriade de tics, d’habitudes, d’obsessions, une volonté de bousculer le spectateur, de le choquer, de le mettre supérieurement mal à l’aise. Et de fait on ne voit pas dans ses films apparaître le mot Fin (toujours écrit en très gros sur l’écran) sans respirer un peu mieux, sans être soulagé d’avoir porté sur ses épaules la masse des malheurs, des haines, des violences, des cruautés, des injustices et des malchances que le cinéaste présente et accumule. Avec une grande complaisance, aussi, pourra-t-on dire, et on n’aura pas tort. La vie est lourde à vivre et le Temps détruit tout, voilà à peu près la morale de ses histoires. Rien de léger, seulement du pesant, un pesant insupportable. (suite…)