Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Le Trou normand

mardi, avril 21st, 2020

C’est idiot sans être marrant.

J’aimerais bien aller dans le sens de ceux qui ont entrepris de ne pas accabler ce cinéma  bon enfant, qui a été indispensable au cinéma tout court, qui avait besoin de sa simplicité, de ses vedettes, de ses truculences pour que puissent émerger des œuvres plus ambitieuses et mieux tenues. J’aimerais bien trouver dans le foisonnement des acteurs de second rang, tous plus sympathiques et talentueux les uns que les autres des raisons de défendre Le trou normand, son récit bonhomme, la douceur paisible des villages de 1952, les bistrots où la société se retrouve, les écoles peuplées de garnements obéissants (faux oxymore volontaire) et la religion du certificat d’études qui valait bien autant qu’un baccalauréat d’aujourd’hui. (suite…)

L’indomptée

lundi, avril 20th, 2020

Un bijou en toc dans un écrin sublime.

Supposons que vous ayez passé deux des plus délicieuses années de votre jeunesse dans un des plus lumineux cadres du monde et en compagnie de camarades artistes beaux et intelligents. Est-ce que, pour tourner votre premier film, vous ne souhaiteriez pas retrouver la parenthèse enchantée qui vous a tant marquée ? C’est-à-dire placer, autour d’une histoire que vous dramatiserez un peu, des physionomies, des caractères, des anecdotes que vous puiserez dans vos souvenirs. Et de ce fait, assurée d’un décor exceptionnel qui vous permettra, entre deux séquences du récit, de réaliser de très belles images et d’un substrat suffisant de petits bouts d’aventures, vous pourrez mettre en scène un film assez original et très joli. (suite…)

L’homme du train

dimanche, avril 19th, 2020

Un film aux couleurs d’ombre.

Novembre à la fin du jour, qui tombe tôt en cette saison. Annonay, ville sinistre à l’est du Massif central, frileuse, crasseuse ; 18000 habitants, la ville la plus peuplée du sévère département de l’Ardèche. La gare, qui n’est plus desservie que par un autorail qui se survit à peine. Un homme descend du train, gagne les rues du centre. Il doit être un peu plus de sept heures. Plus un passant, tous les magasins sont fermés. À part, seule lumière dans l’ombre, une pharmacie attardée. L’homme y entre, achète de l’aspirine ; un autre client est là et quitte la boutique. Les deux types cheminent dans les rues vides. Voilà, tout est posé. (suite…)

Le grand chef

samedi, avril 18th, 2020

C’était dans des temps très anciens…

Je crains que ce film ne puisse aujourd’hui être apprécié si l’on a moins de 60 ans ; voire de 65. On peut également le faire regarder à des enfants en dessous de 12 ans, voire de 10, dont l’esprit critique est moins aiguisé qu’il le sera ensuite et dont la capacité de s’amuser d’aventures assez gentilles est encore intacte. Mais il faudra tout de même leur expliquer qu’il a existé un cinéma en Noir et Blanc, ce qui ne manquera pas de les interloquer (Mais enfin ! La vie est en couleurs !). En tout cas pour les nombreuses classes d’âge qui vont de l’adolescence au début de la vieillesse, je crains que Le grand chef ne puisse être regardé qu’avec un sourire de commisération. (suite…)

The Intruder

vendredi, avril 17th, 2020

Le mauvais génie.

Du prolifique Roger Corman (une soixantaine de réalisations), je ne connaissais jusque là que la veine horrifique, du médiocre Corbeau au magnifique Masque de la mort rouge, une grande quantité de films le plus souvent inspirés par des contes d’Edgar Poe, souvent un peu oubliés aujourd’hui. Mais je n’imaginais pas qu’il avait tourné une œuvre intéressante et militante, cet Intruder qui est une charge forte, intelligente et nuancée contre la ségrégation raciale, qui empêchait, près d’un siècle après la guerre de Sécession, les élèves noirs de fréquenter les écoles blanches. (suite…)

Olivia

jeudi, avril 16th, 2020

Chaste Gomorrhe !

Je ne dis pas qu’il était facile et fluide de représenter en 1950 un pensionnat de jeunes filles du siècle précédent où l’homosexualité est à la fois informulée, diffuse et omniprésente. D’autres films, qui avaient montré une jeune fille passionnément amoureuse d’un de ses professeurs, comme Mädchen in Uniform de Leontine Sagan en 1931, ou un climat général un peu ambigu de touffeur sensuelle comme Au royaume des cieux de Julien Duvivier en 1949 étaient infiniment moins explicites. Dans le film de Jacqueline Audry la liaison tumultueuse entre les deux directrices de l’établissement, Julie (Edwige Feuillère) et Cara (Simone Simon) est connue et admise par tout le monde, mais personne ne fait mine de remarquer sa dimension charnelle. (suite…)

Ninotchka

jeudi, avril 16th, 2020

Ah Paris ! Toujours l’amour !

Sur la vaste étendue, la grande mappemonde du cinéma, il y a beaucoup de continents que j’ignore et beaucoup d’archipels où je ne m’égarerai jamais. Mais il y a des contrées qui devraient m’être proches et où je n’ai pas mis le nez. Il y a presque soixante-dix ans que j’ingurgite des films (j’ai commencé très très tôt) et pourtant Ninotchka n’est que la deuxième œuvre d’Ernst Lubitsch que je regarde et c’est là que je découvre la mythique Greta Garbo dont j’ai eu les oreilles rebattues pendant ma jeunesse (Ah ! Si vous aviez connu Greta Garbo !). (suite…)

Tropical malady

mardi, avril 14th, 2020

Plaisirs campagnards.

Il y a des moments où je me dis qu’un large exotisme ferait du bien à ma triste mentalité de Parisien confiné, par ailleurs peu amateur de voyages et moins encore de nouveaux horizons. Soyons fou ! me suis-je dit en entreprenant de regarder le film d’un réalisateur thaïlandais qui porte le nom à coucher dehors de Apichatpong Weerasethakul et qui – je l’ai découvert un peu plus tard – est allé jusqu’à remporter la Palme d’Orlors du festival de Cannes de 2010 avec un film orgueilleusement intitulé Oncle Boonmee (celui qui se souvient des vies antérieures) qui, me semble-t-il n’a laissé absolument aucune trace dans les esprits (sauf sans doute à Télérama et aux Inrockuptibles évidemment). (suite…)

Un dimanche à la campagne

mardi, avril 14th, 2020

« Le vase où meurt cette verveine… »

Voilà un joli film modeste, sans péripéties, un peu triste. Un film qu’on pourrait dire aussi fané, comme peut l’être un bouquet de roses encore belles, un film de tonalité mineure, au sens musical du terme. Paisible, bien élevé, sage, finalement. Un film qui porte très bien son titre, Un dimanche à la campagne, avec ce que ces quelques mots simples peuvent éveiller des souvenirs en nous : la gentille routine des repas de famille, les chatoiements du temps qui passe, les heures passées à l’ombre des tonnelles, les éclats de soleil et la fraîcheur de l’ombre. Et sans doute aussi, sûrement, un petit morceau d’ennui avec, à la montée du soir, le regret d’avoir laissé passer ce nouveau dimanche, qui est un de plus pour les jeunes, un de moins pour les vieillards. (suite…)

Versailles, la visite

mardi, avril 14th, 2020

À la merveille.

Le plus beau palais qu’on ait jamais vu sous le ciel, montré par Gérard Corbiau, d’une façon subtile et intelligente ; l’extraordinaire splendeur des lieux, bâtiments, escaliers, salons, bosquets, jardins présentée par un réalisateur qui ne se contente pas de donner au spectateur de belles images, des soleils qui se couchent sur les grands miroirs d’eau et les façades arrogantes, des gros plans sur la merveilleuse élégance des modillons, des revêtements, des galeries, des tableaux, des plafonds peints, des glaces, des meubles, des horloges, des porcelaines, des bibelots. Cette sublime attention aux plus obscurs des détails, à ce que l’on voit et qui éclate, mais aussi à ce qui paraît dissimulé mais que l’artisan qui l’a réalisé tient à honneur de réaliser dans une forme de perfection. (suite…)