Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Les amants de la nuit

vendredi, mars 20th, 2020

La mort qui rode.

C’est encore une histoire de fatalité, ou peu s’en faut. Un jeune voyou, Bowie Bowers (Farley Granger) qui a écopé de cinq ans de prison pour assassinat, s’évade avec deux truands chevronnés, le borgne Chicamaw Mobley (Howard Da Silva), qui est un peu psychopathe et Henry T-Dub Mansfield (Jay C. Flippen), un peu davantage subtil. Bowie n’a pas une grande vocation pour le monde du gangstérisme, mais il ne voit pas bien ce qu’il pourrait faire d’autre et d’ailleurs ses deux compagnons lui rappellent qu’ils l’ont distingué au bagne et choisi pour l’évasion afin qu’il les accompagne désormais dans leurs mauvais coups. Les trois hommes se réfugient chez Mobley (Will Wright), frère de Chicamaw et père de la jeune Keechie (Cathy O’Donnel). Arrive ce qui doit arriver : Bowie et Keechie se plaisent et vont lier leurs destins (comme on dit dans les romans de gare).

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Pour toi j’ai tué

jeudi, mars 19th, 2020

Ancrés dans la chair.

Steven Thomson (Burt Lancaster) est un représentant typique de la middle class californienne du lendemain de la guerre. Il a tout pour mener pour une vie paisible, comme son jeune frère va bientôt le faire, même si sa vieille maman est un peu trop présente et couve avec un soupçon d’inquiétude son grand beau garçon. Mais il a le malheur de connaître une des filles faciles du coin, sûrement la plus belle, Anna (Yvonne De Carlo) qui a beaucoup de goût pour les bijoux, les belles voitures, la grande vie. Mais qui a aussi – et c’est là que le film est intéressant et original – beaucoup de goût pour Steven. Dans le cinéma bien puritain des États-Unis de 1949, voilà une évidence (un scandale ?) assez rarement montrée : l’attirance charnelle intense, palpable, fatale entre cet homme et cette femme. (suite…)

Le pari

mercredi, mars 18th, 2020

L’insoutenable légèreté de la volute.

Le 6 mars 1986, il y a donc un peu plus de 34 ans, j’ai écrasé pour toujours ma dernière cigarette. J’y avais quelque mérite puisque, aux derniers temps de ma tabagie, je fumais trois paquets de Gauloises sans filtre par jour. Et je ne négligeais pas les gros modules de Havane, Monte CristoRomeo y JuliettaRey del MundoHoyos de Monterrey et autres merveilles. Est-ce possible ? Comment peut-on faire ça ? va-t-on se demander. Mais bien sûr que c’est possible : il suffit de ne faire que ça, du matin au soir et d’allumer une cigarette au mégot rougeoyant de l’autre. D’ailleurs, si je n’avais pas arrêté, je pense que je serais passé sans trop d’efforts à quatre paquets quotidiens. Remarquez, je ne serais sans doute plus là pour vous le conter, la réalité médicale finissant par l’emporter et entraîner ad patres l’intoxiqué. (suite…)

Incendies

mardi, mars 17th, 2020
L’Orient compliqué.
Le film est en partie inspiré du parcours de la militante communiste libanaise Souha Bechara qui, née dans une famille de culture chrétienne orthodoxe mais dont le père était un actif marxiste (la chose n’est pas rare dans ces contrées compliquées) devint dès son adolescence une pasionaria pro-palestinienne. Elle essaya, à ce titre, d’assassiner le général maronite Antoine Lahd qui contrôlait le sud du pays avec le concours d’Israël contre le Hezbollah chiite. Il faut dire que si on ne s’intéresse pas un minimum à la situation brûlante et sanglante du Proche-Orient, et singulièrement à celle du Liban, on perd beaucoup de la substance d’Incendies.

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Le convoi sauvage

lundi, mars 16th, 2020

Des temps farouches.

Si j’étais le directeur de l’Office du Tourisme du coin où a été tourné Le convoi sauvage, je m’empresserais de faire acheter toutes les copies en circulation pour les détruire, de façon que personne ne soit dissuadé de venir découvrir le pays. Remarquez, on ne sait pas vraiment où le film se situe. Dans le Nord-Ouest des États-Unis de 1820, est-il dit, et à proximité du Missouri, affluent majeur du Mississippi, mais est-ce dans le Dakota du Nord ou du Sud, dans le Montana (ou encore ailleurs quelque part dans les Appalaches ?), ce qui fait beaucoup de paysages glaçants, rébarbatifs et plutôt très moches qui défilent tout au long du long périple conduit par le capitaine Henry (John Huston) et sa troupe de vauriens (de rascals, dit-on en anglais). (suite…)

The bench

vendredi, mars 13th, 2020

Seul contre tous.

Il faut croire qu’il existe un cinéma danois, ce qui n’est pas donné à tout le monde et qui ne se limite pas à l’ancêtre Dreyer. À regarder d’un peu près il y a eu Bille August qui a obtenu deux Palmes d’or à Cannes (Pelle le conquérant et Les meilleures intentions) et surtout l’équipe du Dogme avec Thomas Vinterberg (Festen) et surtout Lars von Trier dont on ne peut pas ignorer Dancer in the darkAntichrist et Melancholia. Et tout cela a éveillé de nouveau cinéastes, comme ce Per Fly qui s’est intéressé aux prescriptions strictes du Dogme, mais s’en est utilement débarrassé pour se plonger dans une sorte d’exploration sociologique de la société danoise. (suite…)

Viva Zapata !

vendredi, mars 13th, 2020

Mélancolie mexicaine.

Toutes les légendes politiques ont besoin d’incarnations. Surtout à gauche, puisque c’est la dimension de l’utopie qui la mène et qui fait rêver ses partisans. Ça va de Rosa Luxembourg, la madone des spartakistes allemands à Che Guevara l’arrogant petit tueur argentin qui engagea Cuba dans l’impasse marxiste, sans oublier un détour par Jean Jaurès l’assassiné de 1914 qui réussit l’exploit d’avoir un nombre considérable de rues et de boulevards à son nom alors qu’il n’a jamais eu la moindre responsabilité gouvernementale. Et il y aussi, sans doute en partie, à cause de son nom qui claque comme un coup de fouet, Emiliano Zapata, un nom qui réapparaît chaque fois que, dans les programmes électoraux, un candidat prétend donner le pouvoir au peuple, au dessus des élus. (suite…)

Oncle Yanco

mercredi, mars 11th, 2020

Les temps déraisonnables.

La caractéristique des DVD éditée par Ciné-Tamaris, qui est la maison de production d’Agnès Varda, est d’être truffés, aux côtés du principal film présenté, d’une kyrielle de petits courts, des courts-métrages tournés ici et là, au hasard des années, qui sont évidemment en rapport avec le film majeur. Dans le DVD de Lions love qui comporte aussi le petit pamphlet Black panthers, voilà que je trouve Oncle Yanco. Et j’ai le singulier travers de regarder tout ce qui figure sur les DVD que je possède et, pire encore, de m’imposer d’écrire sur tout ce que j’ai vu (sauf exceptions rarissimes, qui confirment évidemment la règle), afin d’améliorer encore ma faculté de rédiger sur n’importe quoi. (suite…)

Calvaire

lundi, mars 9th, 2020

Les surprises de l’amour.

Être présenté comme un conglomérat unissant des films aussi différents que PsychoseDélivrance et même La Passion du Christ n’est pas forcément un cadeau ; ça met la barre bien haut et forcément, après avoir été regardé, ça déçoit un peu. On a vu tant et tant de ces films de sauvages où un individu lambda, à peu près civilisé (comme vous et moi) se trouve ex abrupto plongé vers l’immondice, la sauvagerie, la brutalité qu’on s’attend toujours à tout. On sait qu’à un moment donné une violence absolue va se déclencher qui ne sera comprise ni par nous, spectateurs confortables, ni par le malheureux clampin qui n’a absolument aucun moyen d’échapper aux hordes sauvages et qui se retrouve – lorsqu’il parvient à survivre – hagard et dévasté. (suite…)

Jusqu’à la garde

lundi, mars 9th, 2020

D’amour et d’eau fraîche.

Ma foi ! Je dirais volontiers que l’attribution des colifichets et des bimbeloteries des Césars et toutes les polémiques qui accompagnent ce rituel essoufflé n’ont vraiment aucune importance. Je n’avais pas souvenir que Jusqu’à la garde eût obtenu la récompense suprême de meilleur film et quelques récompenses adventices (dont celui de la meilleure actrice) en 2019. Il me semble que, jusqu’à voir le film en DVD je n’avais jamais entendu parler de son réalisateur, Xavier Legrand, ni de son actrice principale, Léa Drucker, que je pensais fille de Michel Drucker et sœur de Marie Drucker (mais ce n’est pas ça du tout). (suite…)