Réservé aux dinosaures…
C’est arrivé à 36 chandelles ne déçoit pas une seconde l’amateur de ringardises touchantes et de nostalgies attendries.
Il me fallait bien ça, hier soir, pour quitter le bunker de La chute ! Me retrouver dans un monde enchanté, seulement à demi-connu (en 57, à dix ans, je ne regardais pas la télévision), mais tellement proche et tellement brave !
L’intrigue, qui occupe tout de même les deux tiers du film, n’a aucune importance ; elle est pourtant plus drôle, mieux enlevée que celle de Cinq millions comptant, qui est de la même farine et où l’on retrouve aussi la fatigante Jane Sourza ; surtout elle donne plein d’aperçus intéressants sur ce que pouvait être la télévision en ses temps de naissance balbutiante : les appareils, bien sûr, patauds et ventrus, mais aussi et surtout les programmes que des équipes de pionniers élaboraient dans l’immeuble de la rue Cognacq-Jay et, un peu plus tard, aux studios des Buttes-Chaumont… Et je songe aussi à ces magasins de bourgades endormies où se vendaient tout à la fois des appareils électroménagers, de la photographie et des disques… On était servi par des vendeurs à blouse grise qui restaient quarante ans dans la même maison…
C’est arrivé à 36 chandelles
est tout plein de numéros, de vedettes, de chanteurs, de sketches ; si Jean Richard
confirme, s’il en était besoin, son abyssale nullité et son absence totale de talent comique, et si Roger Pierre et Jean-Marc Thibault exaspèrent d’affèteries, on est aussi tristement déçu par Fernand Raynaud
, dont la gestuelle est pourtant parfaite (superbe imitation du défilé militaire, en tout cas au début de la prestation)… En revanche, Philippe Clay
est étincelant ; et l’on est aussi impressionné par la façon de chanter de Juliette Gréco
ou de Dany Dauberson… Il faudrait plusieurs siècles aux stagiaires de la Star’Ac pour parvenir à ces phrasés parfaits…
Ah ! Au fait, qui a reconnu, dans le jeune premier, Jacques Riberolles, qui fut, dans les enchantées Demoiselles de Rochefort
, Guillaume Lancien, le galeriste amant de Delphine (Catherine Deneuve
) et qui joua, pendant vingt ans, les beaux mecs cyniques ?