Toutes cases cochées.
Bien que le film emprunte tant et plus à la riche grammaire des films d’horreur modernes, Détour mortel : la Fondation dispose d’un scénario assez original et intéressant. En tout cas pour les vieux machins comme moi qui ne possèdent qu’imparfaitement les codes actuels des films d’horreur, où l’inventivité des monstruosités – et les images numériques – permettent d’aller beaucoup plus loin que ce à quoi ils (les vieux machins) étaient habitués. D’ailleurs je me demande jusqu’où on pourra exagérer dans le sang et le gore tant les images d’aujourd’hui peuvent aller loin dans le répulsif et le dégoûtant.
Il paraît, au demeurant que le film de Mike P. Nelson est le préquel d’une longue suite, que j’ignorais jusqu’alors et qui compte, à l’heure actuelle cinq films, tous postérieurs donc à celui dont je me propose de vous entretenir. Le cinéma d’horreur est d’ailleurs ainsi fait qu’il s’assied sur de longues séries, puisque, cinéma d’adolescents, il retrouve et présente des histoires interminables où les méchants ne sont jamais vraiment et tout à fait éliminés à la fin.
Détour mortel : la Fondation emprunte à bien des films ses bases : Le projet Blair witch (pour l’omniprésence de la forêt hostile), Délivrance (pour la quantité de dégénérés présentés), The descent (pour les moments passés dans des boyaux hostiles), Massacre à la tronçonneuse (pour quelques séquences violentes), Le village (pour la représentation d’une communauté fermée et sûre d’elle-même ; on pourrait d’ailleurs aussi penser à The wicker man).
Donc six jeunes niais s’enfoncent dans la profonde forêt de Virginie sur le Sentier des Appalaches (qui doit être aussi célèbre là-bas qu’et le GR20, en Corse, chez nous). Aucune case ne manque dans la nomenclature du Camp du Bien. Il y a l’héroïne du film, Jennifer (Charlotte Vega) et son fiancé noir, Darius (Adain Bradley) ; il y a un petit couple homosexuel Gary (Vardaan Arora) et Luis (Adrian Favela), l’un chicano, l’autre asiatique et un autre couple, blanc et hétérosexuel (il en faut aussi, non ?) Milla (Emma Dumont) et Adam (Dylan McTee). Tous sont éminemment soucieux d’environnement et de morale. De vrais électeurs de Joe Biden, on le comprend tout de suite.
Ils vont commencer leur périple chez de vrais électeurs de Donald Trump, mais ce n’est pas ça qui sera le plus horrible : il y a bien pire. Il y a une sorte de communauté survivaliste, fondée en 1859 et qui s’est retirée alors du monde, craignant l’effondrement des États-Unis d’Amérique et la fin de son mode de vie, appuyé sur la chasse, la pêche, le rejet de toute administration fédérale et de toute obligation civique. La chose n’est d’ailleurs, paraît-il, pas rare dans cette étrange nation.
Comme de juste, dès que les six jeunes gens s’aventurent hors des sentiers tracés – qu’on leur avait pourtant bien dit de ne pas abandonner – les horreurs et les monstruosités commencent. Le premier, c’est Gary, littéralement écrasé par un tront d’arbre qui dévale et qui le fauche. Peu à peu l’étau se resserre et les cinq amis qui restent sont abattus. Comme dans Apocalypto ou dans 2000 maniaques, il y a des pièges très inventifs qui envoient ad patres les malheureux qui en sont victimes. Et finalement les survivants sont capturés par l’étrange communauté qui vit dans une farouche indépendance au milieu des bois, se gardant bien d’avoir des contacts continus avec les villageois du coin, les uns et les autres se connaissant mais ne s’approchant pas.
Le scénario du film ne manque pas d’originalité : il tisse avec une certaine inventivité l’histoire des jeunes gens capturés et la quête de Scott Shaw (Matthew Modine), le père de Jennifer, parti à la recherche de sa fille disparue. C’est bien fait, haletant, on a son content d’images gore et de retournements de situation (jusqu’à la fin, unhappy end qui devient, de façon un peu roublarde, happy end) et ça permet de se moquer un peu de ces écolos woke qui, pour survivre, retrouvent l’instinct vital, c’est-à-dire l’instinct de tuer l’ennemi.