Après une nouvelle vision, je baisse de 5 à 4 une note qui était trop élevée par rapport à celle du premier opus de la série des Dracula de la Hammer, l’inoubliable Cauchemar ; c’est plus roublard, plus romanesque, ça joue trop, et de façon un peu mécanique sur les contrastes de personnalités des malheureux touristes égarés en Transylvanie qui, pour leur évident malheur (et notre non moins évident plaisir) n’ont de cesse que de se jeter dans la gueule de la chauve-souris (si je puis oser cette image hardie !).
De toute façon, même à essayer d’adapter au mieux l’admirable roman de Bram Stocker, on ne peut guère sortir d’une problématique assez simple qui, la grammaire vampirique assimilée, permet à tout un chacun de se constituer son vadémécum personnel, à partir de crucifix de dimensions diverses, d’eau bénite, de gousses d’ail, de pieux de bois dur parfaitement aiguisés et tout le tremblement.
Je regrette assez que la Hammer n’ait pas, dans une des multiples suites du Cauchemar toutes interprétées par Christopher Lee, fait adapter un des épisodes les plus angoissants du roman, celui du journal de bord du capitaine du navire qui transporte – sans que quiconque s’en doute – le Comte en Angleterre… Mais je puis me tromper, n’ayant revu ni Dracula et les femmes, ni Les cicatrices de Dracula, ni Une messe pour Dracula depuis leur sortie sur le grand écran, et n’étant pas disposé à les revoir du fait du souvenir cuisant de leur nullité… (depuis que j’ai écrit cet avis, j’ai revu ces films et j’ai plutôt changé d’avis : plutôt mieux que je ne me les rappelais).
Ce qu’il y a de meilleur, dans Dracula, prince des ténèbres c’est, comme souvent dans les films qui mettent le Mal en scène, les suppôts de l’Enfer : c’est vrai dans Rosemary’s baby, c’est vrai dans La malédiction ; ici, c’est la perversion sauvage et le dévouement absolu du serviteur-majordome Klove (Philip Latham), à la physionomie glaçante et la sujétion d’un pauvre voyageur devenu fou après avoir approché Dracula, recueilli par le monastère, qui s’appelle Ludwig (Thorley Walters) et qui est, en fait le Renfield du roman, gobeur de mouches et introducteur du Vampire dans les enceintes d’apparence protégée…
La fascination sexuelle exercée par Dracula sur celles qu’il a choisies est très explicite, et même assez hardie : ainsi la scène où il découvre son torse nu, qu’il scarifie d’un coup d’ongle, et où il est à deux doigts d’amener sa victime à boire son propre sang, victime sauvée in extremis par la survenue de son mari ; ainsi telle autre victime qui découvre son mari égorgé mais n’en tombe pas moins, en un clin d’œil, sous le charme extrême du monstre…
La séquence finale de la glace brisée à coup de fusil qui, révélant ainsi l’eau vive, fatale au vampire, qui l’engloutit et le fait disparaître (jusqu’à sa résurrection suivante, hélas !) n’est pas mal non plus, même si l’opportunité du cahot qui envoie le cercueil où repose le Comte sur la rivière gelée est un peu factice…
Enfin, ce n’est pas mal, pour une suite… mais ce n’est qu’une suite…