Eraserhead

Un des cauchemars les plus forts qui se puissent…

Un cauchemar ? Non, bien pire qu’un cauchemar… Un cauchemar de 80 minutes, noirâtres, bourbeuses, salies, c’est plus long qu’un cauchemar…

Tout y est,  et on est rarement plus dans le malaise au cinéma… Gouffres sombres de l’imaginaire, recoins malsains, peurs hypnotiques, terrains vagues huileux, cloaques de nos terreurs ordinaires… Tout le David Lynch d’aujourd’hui est déjà dans ce premier essai : les ampoules qui grésillent, par exemple qu’on retrouve dans Lost Highway ou dans Mulholland drive, la scène où chante La fille du radiateur  aux joues grotesquement hypertrophiées (Jean Lange) évoque déjà le cabaret Silenzio ; il y a déjà ce goût du grotesque, de l’infirme, de l’anormal, du maladif…

Qui a vu Eraserhead ne peut ne pas être impressionné par le soin extrême apporté à la bande-son (intéressante intervention de Lynch lui-même sur ce sujet, dans un des suppléments du DVD) ; il n’y a pas une minute de silence et une des fortes puissances du film est celle des bourdonnements, grincements, raclements, clapotis, sifflements, grondements… Dans la nuit d’Henry Spencer (Jack Nance), il y a la pluie battante qui se lie aux gémissements de la créature ou au grouillement des monstres accouchés par Mary (Charlotte Stewart) ; il y a tout le temps un son qui dérange, qui inquiète, qui instaure un trouble…

Comment ne pas s’incliner devant la puissance du cinéma, qui, seul, peut susciter cette force d’angoisse ?

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