Ennuyeux, verbeux, artificiel…
Si j’exclue le remarquable Psychose, mené de main de maître grâce à une intrigue à la fois simple et efficace, mes rencontres avec le nom révéré par beaucoup d’Alfred Hitchcock sont placées sous le signe d’une incompréhension majuscule (ce qui, soit dit en passant, ne doit pas le déranger beaucoup, s’il me considère de Là-Haut). J’ai essayé déjà L’inconnu du Nord Express et Le crime était presque parfait. Devant ma déception, à chaque fois, les thuriféraires du réalisateur m’ont gourmandé avec un bon sourire de commisération. Enfant ! Que n’avez vous regardé un des chefs-d’œuvre du Maître, plutôt qu’un film qui demande une connaissance et une empathie approfondies avec Sir Alfred !!.
Prenant au mot les conseils de la Secte hitchcockienne, j’ai acquis et regardé Fenêtre sur cour, dont j’avais lu ici et là que c’était un des films majeurs du gros bonhomme à l’œil égrillard. On va sans doute encore me chipoter que La mort aux trousses, ou Sueurs froides sont insurpassables et que j’aurais mieux fait de mettre mes picaillons (mes pistoles, mes maravédis, mon blé, mon pèze, mon pognon) dans un de ces films-là. Mais bon ! À force d’épurer le système, il en devient tout étique.
Toujours est-il que je me suis passablement ennuyé au spectacle médiocre donné par cette fenêtre ouverte sur une cour où, comme par hasard, les habitants de l’immeuble agissent tous en même temps et s’exhibent avec une grande complaisance devant Jeff Jefferies (James Stewart). Ce garnement puritain d’Hitchcock ne fait grâce au spectateur d’aucune vignette coquine, de la ballerine qui fait ses entrechats en petite tenue aux deux filles qui prennent un bain de soleil sur leur terrasse. Mais comme tout cela se passe dans les vertueux États-Unis de 1954, ça ne rince pas l’œil de l’honnête amateur, qui doit se contenter de virtualités frustrantes.
Ceci est du détail. Le pire est l’histoire policière indigente et la façon de la présenter. C’est suant d’ennui. On se croirait vraiment au théâtre, avec ses apartés et ses ficelles. Pas le moindre suspense, pas la moindre appréhension, au point que ça en devient ridicule.
James Stewart, au torse étrangement maigrelet, était doté d’un physique de vieux beau qui, je le conçois, pouvait plaire aux ménagères du Middle-West. Raymond Burr, avant d’être l’ennuyeux héros de la série L’homme de fer, ne disposait déjà pas d’un jeu léger. En fait, le seul agrément de ce film misérable est Grace Kelly qui, seule, me fait hausser ma note au dessus du 0. Je la tenais pour une sorte de potiche ennuyeuse à la Kim Novak ou Tippi Hedren, à la fois spectaculaires et glaciales. Je l’ai découverte dans Haute société de Charles Walters où elle mettait du poivre dans sa blondeur. Et Fenêtre sur cour me confirme qu’elle aurait bien mieux fait de continuer à faire du cinéma plutôt que d’épouser Rainier de Monaco et d’avoir des enfants aussi médiocres… mais ceci est une autre histoire.
Je vais finalement penser, comme on me l’a opportunément insinué que »mon univers cinématographique n’est pas compatible avec celui d’Alfred Hitchcock, comme il peut être de même pour les relations amoureuses ». Voilà donc une affaire presque réglée…