House by the river

Ombres sur la rivière.

Un généreux donateur m’ayant fait cadeau d’un beau coffret de Fritz Lang, dont ma connaissance est fort médiocre, j’ai entamé mon visionnage par House by the river, opus le moins notoire dudit coffret pour, en quelque sorte effectuer ensuite une montée chromatique.

Que penser de ce film de 1950, mais dont l’intrigue se situe aux premières années du siècle, dans la société morale, compassée, puritaine d’une petite ville des États-Unis ? Que c’est la plupart du temps admirablement mis en scène, malgré les tics assez datés de l’expressionnisme (gros plan sur l’œil de l’abominable Stephen (Louis Hayward), mimiques du même, trop outrées faisant songer au cinéma muet), malgré, dans les premières séquences, un décor de jardinets contigus assez faux (qui m’a fait irrésistiblement songer aux pénibles Smoking/No Smoking d’Alain Resnais et à la scène d’un théâtre), malgré le côté un peu ridicule et surjoué des scènes violentes, l’assassinat par Stephen de la servante Emily (Dorothy Patrick) et l’accident hallucinatoire qui débarrasse la Terre de cette fripouille misérable.

XISi j’ai par ailleurs trouvé l’intrigue atone et le rythme alangui, il y a des tas de choses formidables : l’éclatante absurde survenue du désir de Stephen pour Emily qui sort du bain, dans le clair-obscur sensuel de l’escalier, l’errance sur la rivière des deux frères Stephen et John (Lee Bowman) pour se débarrasser de la dépouille d’Emily, et la recherche désespérée quelques jours après par Stephen du sac qui contient le corps, dans un décor fantastique de rives vaseuses, d’eau morte et de souches pourrissantes… Rien que pour ces moments de tension extrême, splendidement composés, House by the river vaut d’être vu…

J’ai dit plus haut que les mimiques de Louis Hayward sont assez agaçantes ; à part cela, il campe tout de même très bien un sale type aboulique, veule, paranoïaque, à la limite de la mégalomanie, qui, après avoir rencontré la volupté et l’apparence d’omnipotence du crime aurait tout pour faire un assez joli tueur en série, s’il n’était opportunément rayé du nombre des vivants. Son œil dément, sa terreur jouissive de se découvrir tel qu’il est vraiment font quelquefois songer à l’expression morbide du Jack Torrance (Jack Nicholson) de Shining, ce qui n’est pas un mince compliment…

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