Un des films les plus nunuches, les plus niais, les plus ridicules de ma longue vie de cinéphage. Au mieux, dans les quelques séquences du début, c’est un copier/coller du Fabuleux destin d’Amélie Poulain de ses images mordorées, vertes et jaunes, de ses gros plans brutaux et de ses coups de zoom incompréhensibles ; de ces petits bouts d’anecdotes enfantines, séquences tristes obligées. Les parents présents comme ceux d’Amélie, enfoncés dans leur malédiction et leur tristesse ; ainsi la mère (Emmanuelle Grönvold) du héros Julien (Guillaume Canet), frappée d’un cancer, qui disparaîtra vite mais laissera son fils et son mari (Gérard Watkins) inconsolables.
L’idée, au demeurant, n’est pas absurde d’examiner au scalpel ce que la jactance, l’orgueil, la volonté de ne pas céder, d’aller plus loin que la mesure peut entraîner de malheurs. Encore faut-il que le réalisateur choisisse son registre. Un beau mélodrame flamboyant de tristesse, sur les occasions ratées, les vies sacrifiées, n’a rien pour me déplaire ; encore faut-il qu’il puisse demeurer corseté dans sa logique. Ce qui n’est pas le cas ici. Amélie Poulain demeure un merveilleux conte de fées où, malgré les méchancetés de la vie, les fées, précisément, parviennent à renouer les fils des destinées et à leur assurer un avenir délicieux.
Rien de tout cela dans le film de Yann Samuell, qui hésite sans cesse entre la gravité et la désinvolture. Les deux gamins ont bâti leur harmonie amoureuse (cette amour qu’ils ne s’avoueront qu’à l’extrême fin) sur une sorte de défi perpétuel qu’ils se lancent : T’es cap ? T’es pas cap ? jonglant sur des fariboles qui les font frémir et s’émerveiller mais qui, parallèlement, les empêchent de vivre autrement qu’en se provoquant, en s’éblouissant sans raison ni pertinence dans des paris toujours tenus et parfaitement inutiles.
À force de rester à la surface des choses, voilà que leur amour, si profond, si intense, si évident, se casse les dents sur la réalité. Dès lors, comment se sortir de cette réalité, sinon en la supprimant, en se supprimant ? Le dernier quart d’heure de Jeux d’enfants est particulièrement pénible, à la fois onirique, niais, larmoyant, romanesque, perdant pied avec la structure même du récit ; il est vrai qu’on a depuis longtemps compris qu’il ne s’agissait pas d’une contemplation amère, à l’italienne (pour être simple) mais d’un truc dont le réalisateur Yann Samuell ne saurait pas vraiment se sortir. Le film a connu un certain succès public ; c’est normal : les histoires d’amours impossibles et melliflues rencontrent toujours les larmes de Margot et son admiration émue. Surtout que l’affreuse rengaine La vie en rose, tellement célébrée par l’histrion François Hollande et sa compagne Valérie Trierweiler, en irrigue beaucoup trop de séquences.
Film ridicule. Fin (les deux amoureux dans un EPHAD) à pleurer de rire ou d’accablement (au choix). À fuir.