Jonathan

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Souvenir très ancien et très daté

À l’époque où aucun film de vampires n’échappait à mes yeux avides, j’étais allé voir ce curieux Jonathan,dont le titre original allemand est Jonathan, Vampire sterben nicht (i.e. Les Vampires ne meurent pas).

Mais l’époque où j’ingurgitais les flots de sang vermeil des malheureuses victimes des épigones du Comte Dracula était malencontreusement aussi celle qui a entouré le risible Mai 68 ; en d’autres termes, le moindre tâcheron de plume, de pinceau, de guitare ou de caméra se croyait obstinément appelé à remplir une mission d‘éveil des masses et à témoigner, dans un grand mouvement en-soi révolutionnaire, de la pourriture intrinsèque de la société bourgeoise réactionnaire, celle-ci toujours forcément complice de l’obscurantisme clérical (au mieux) ou du danger permanent de retour du national-socialisme (au pire).

Présenter le vampirisme comme une métaphore du nazisme, et les prédateurs buveurs de sang en images ressemblantes des démons qui envahirent l’Allemagne entre 33 et 45 était chose tentante pour un cinéaste germanique. Et Geissendörfer ne s’en est pas privé.

j4Mais, indépendamment de cette démarche, très clairement engagée (et, forcément, lourde, comme tous les engagements, sauf miracle), le film présentait quelques lumières esthétisantes que je me rappelle très bien venues : dans un petit matin encore très gris bleu, dans la lumière particulière d’une ville des abords de la Baltique, le bruit des bottes du Comte Vampire marchant sur des trottoirs sonores, et le long panoramique qui l’accompagne ; ou bien les Vampires – rassemblés en une sorte de secte (un peu comme dans Entretien avec un vampire) et vêtus, hommes et femmes indifférenciés, de longues robes noires, rouges ou blanches – se livrant à d’étranges cérémonies vénéneuses ; et les mêmes, assemblés et assiégés par les habitants sains de la Ville sur une grise plage nordique (métaphore évidente de l’éveil du Prolétariat !) et disparaissant avec le lever d’un pâle soleil…

Je ne crois pas que le film vaille beaucoup plus de 3, peut-être même moins ; mais une bonne re-vision m’amuserait… Et peut-être quelqu’un d’autre que moi, ici, l’a vu ? (Cela étant, je préfèrerais cent fois la réédition des Lèvres rouges de Harry Kümel… ne serait-ce que pour revoir Delphine Seyrig en comtesse Erzébet Bathory…)

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