C’est bien ce qu’il me semblait : La colline a des yeux d’Alexandre Aja est un remake supérieur à l’original. Aja a d’ailleurs déclaré que s’il avait accepté de tourner une nouvelle version, c’est parce qu’il trouvait le film originel, qu’il admire, plein de défauts pouvant être gommés. Et il ajoute qu’il n’aurait pas tourné à nouveau Massacre à la tronçonneuse, qu’il juge parfait (l’Allemand Marcus Nispel n’a pas eu ces scrupules et a réalisé une nouvelle version intéressante, mais inutile).
Toujours est-il que ces deux histoires de braves gens comme vous et moi perdus dans une horreur à quoi ils ne sont pas préparés et qui parviennent à s’en sortir en ayant perdu pas mal de plumes (l’expression n’est peut-être pas tout à fait appropriée, j’en conviens) ont apporté une riche contribution au genre du film d’horreur. Ou, si l’on veut, ont ouvert un sous-genre particulièrement fécond. Si 2000 maniacs, en 1964, avait déjà exploité le filon, il comportait encore une dimension onirique, qui en rendait acceptable le propos. Mais Massacre à la tronçonneuse en 1974, puis La colline a des yeux en 1977 ouvraient la voie qui s’est poursuivie (et doit se poursuivre) par de très bonnes réussites, comme l’excellent Wolf creek en 2005. On était loin des créatures démoniaques du cinéma fantastique classique, des monstruosités commises par des extra-terrestres, ou des manifestations de Satan dans la vie quotidienne.
Donc, le film de Wes Craven. Il faudrait le revoir avec les yeux qu’on avait il y a presque quarante ans, qui n’étaient pas habitués à la vivacité, au rythme des films violents et sanguinolents d’aujourd’hui. Il manque aussi une caractérisation plus complète des personnages (des victimes, bien sûr), ce qui est un travers fréquent et regrettable, puisque, si on s’est attaché à certaines personnalités, si l’on a sympathisé avec elles, on est d’autant plus marri lorsqu’elles sont zigouillées. Et là, c’est vraiment un ramassis de caractères assez plats, aux traits à peine effleurés : BigBob, paterfamilias macho grognon, Ethel, mère de famille insignifiante et religieuse, Bob, fiston superficiel, Brenda, fistonne bêlante ; il n’y a guère que le couple de jeunes parents, Doug (Martin Speer) et Lynn (Dee Wallace-Stone) qui détonne un peu (et encore !).
Le décor sauvage est remarquablement glaçant et ne donne aucune envie d’aller découvrir le Nouveau-Mexique. Les dégénérés sont hirsutes et spectaculaires ; je regrette que Craven ne s’attarde pas un peu davantage sur la monstrueuse maman qui, je m’en avise à présent, ne me semble pas avoir été éradiquée du paysage ; le roublard réalisateur l’a-t-il réutilisée lorsqu’il a tourné La colline a des yeux 2 ? C’est possible…
Quelques bonnes idées de scénario, la crucifixion incendiée de Big Bob (Russ Grieve), la dégustation d’un canari vivant par Mars (Lance Gordon), la panique de Bob devant Doug : Qu’est-ce qu’on va faire ? Le frigidaire est vide, ils ont nos munitions, ils les ont tous tués, ils ont le bébé, ils ne tarderont pas à revenir !. Commencer par le frigidaire est une délicieuse idée de dialoguiste.
La fin du film est un peu bâclée, notamment la capture et la mise à mort de Jupiter (James Whitworth) qui font un peu cirque.
Mais ce souffle frais dans le paysage compassé du film d’horreur n’était pas sans qualité !