Le locataire

Un des meilleurs Polanski.

Un excellent critique a dit admirablement l’essence du film (le singularisant notamment de l’excellente formule La folie de Trelkovsky n’exclut pas la folie du monde qui l’entoure). Et des aspects très intéressants sont aussi développés dans le livret joint à l’excellente édition Paramount, qui vient de paraître.

Ce livret est signé par Bernard Genin, critique à Télérama ; il éclaire avec beaucoup de pertinence le long et continu malaise qui sourd du Locataire, grande réussite à tous égards, décor, musique, lumière (grise et verte, tout à la fois). Tous les thèmes forts de Polanski s’y emmêlent, fragilité, solitude, marges incertaines, basculements insidieux de la réalité. On y trouve, comme dans Rosemary’s baby, dans Frantic, dans Chinatown le sentiment de panique grandissante qui étreint peu à peu ceux qui se trouvent – ou s’imaginent – totalement isolés dans la foule indifférente ou hostile. Ce qui peut être ressenti, de l’extérieur, comme la paranoïa d’un esprit fragile ou d’un enquiquineur obstiné apparaît, vu de l’intérieur comme une évidence.

Mais ce qui est  très fort, dans Le Locataire, c’est donc l’impossibilité pour le spectateur de se situer, au milieu de ce qui est à la fois une dérive vers la démence et une vaste conspiration, d’autant plus indécelable qu’elle est pratiquement universelle.

Admirable choix de la distribution, avec quelques visages durablement installés dans nos têtes, moins les débutants, encore mal dégrossis, de l’équipe du Splendid, Balasko et Jugnot tout dans l’excès, Michel Blanc qu’on ne remarquerait pas si l’on ne savait ce qu’il est ensuite devenu, que les valeurs sûres, Bernard Fresson, aussi dégoulinant de vulgarité qu’il l’est dans Les galettes de Pont-Aven ou, surtout Jacques Monod, toujours si parfait, et là bistrot cauteleux, à la Marlboro obsessionnelle…

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