Un peu trop habituel
Le retour de Don Camillo, c’est moins la suite d’un film qui a eu un immense succès que la deuxième époque de celui-ci. Deuxième époque, comme lorsqu’on scindait une œuvre un peu trop longue, à la fois pour des questions commerciales et pour ne pas lasser le spectateur. Et indubitablement, ce film-là est de la même eau, de la même nature que le premier, n’apporte pas un élément nouveau dans la saga de Brescello, présentant simplement de nouvelles historiettes sans progression dans le récit.
D’après ce que j’ai compris, toute la série des Don Camillo est issue de courts récits, de nouvelles brèves écrites par Guareschi sans vraie progression dramatique. Eh bien, j’ai l’impression que Duvivier et son co-scénariste, René Barjavel ont choisi la crème pour le premier épisode et, devant son succès, ont pioché dans ce qui restait en magasin pour la suite.
Ce n’est pas que les saynètes qui constituent l’essentiel du deuxième film soient mauvaises… mais elles n’ont pas la verve, l’intelligence, la subtilité du premier ; il y a de la bouffonnerie : le match de boxe/catch, l’ingestion forcée du violent purgatif qu’est l’huile de ricin ; de la philosophie un peu courte : la vente de son âme par Nero (Alexandre Rignault) au docteur Spiletti (Édouard Delmont) ; de la bonne idée un peu facile : l’avance systématique des horloges par les deux clans.
Mais il manque un je ne sais quoi, et il y a sûrement de la facilité : Duvivier reprend les personnages, les situations, les antagonismes, les recycle sans les renouveler, et n’ose pas aller plus loin que ce qu’il frôle. Il avait pourtant quelques pistes sur quoi l’auteur – ou l’adaptateur, plutôt – pouvait appuyer, pour que ça fasse mal : la solitude affreuse de Don Camillo dans la paroisse perdue, glaciale, désolée où il est affecté : son ascension vers son presbytère, alors qu’il porte la grande croix avec qui il dialoguait tellement, à Brescello, est un beau moment de tristesse, comme est désespérant le silence du Christ que Camillo appelle : mais on n’est pas encore, il est vrai, en 1953, dans la désespérance de la comédie italienne, qui aurait pu infléchir vers la tristesse un film qui va, au contraire, donner des gages à la farce.
C’est moins bien, mais ce n’est pas mal tout de même, tant les personnages sont solides et attachants. Et tant ils sont ancrés dans notre collectif imaginaire et ne pourront jamais en sortir.