Autopsie d’un bide.
Vous prenez l’équipe du chef-d’œuvre du gai cinéma d’aventure français, L’homme de Rio. C’est-à-dire le réalisateur, Philippe de Broca, le scénariste, Daniel Boulanger, le musicien, Georges Delerue, le chef opérateur, Edmond Séchan et naturellement, la vedette masculine, Jean-Paul Belmondo. Vous partez sur la solide base d’un roman d’un maître, Jules Verne. Vous ne bénéficiez pas du concours merveilleux de Françoise Dorléac, mais vous compensez, à peu près, par une actrice moins intéressante mais plus spectaculaire, Ursula Andress. Vous bénéficiez d’importants moyens de production, vous permettant de tourner à Hong-Kong, au Pakistan, au Népal, en Malaisie. Vous engagez des seconds rôles qui ont du talent (Jean Rochefort, Jess Hahn) ou à qui la rumeur publique en a accordé (Maria Pacôme, Paul Préboist, Mario David, Darry Cowl).
Avec tout ça, qui devrait être gage de succès, à tout le moins d’un film honorable, vous obtenez une épouvantable daube, sans rythme, sans vivacité, sans drôlerie et sans allant. C’est un bien grand mystère, le rythme, au cinéma ! Philippe de Broca en a souvent maîtrisé les arcanes : L’homme de Rio, évidemment, mais aussi Le Magnifique, L’Incorrigible, avec le même Belmondo et aussi, dans un tout autre genre, Le Cavaleur, avec Rochefort ou Le Bossu, avec Daniel Auteuil ; c’est peut-être même le cinéaste français le plus doué pour le genre.
Belmondo cabriole, castagne, caracole sur le mode qui deviendra habituel ; on est pourtant un peu navré de le voir costumé en strip-teaseuse lors d’un des épisodes les plus pénibles du film. Et finalement, c’est Ursula Andress qui est la plus satisfaisante, même quand elle ne se pastiche pas en recréant la créature de rêve de James Bond contre Dr. No. On m’aurait dit que je hausserais le talent de comédienne de cette belle fille à proportion de sa plastique que je ne l’aurais pas cru !