Océans

Esthétique et ennuyeux.

La carrière d’acteur de Jacques Perrin a connu quelques réussites éclatantes, de La 317è section à Cinema Paradiso en passant par Les demoiselles de Rochefort.

Sa carrière de réalisateur-producteur-scénariste-documentariste a commencé par un véritable chef-d’œuvre de sensibilité et de montage, Les enfants de Lumière, qui, en 1995, pour le centenaire de son invention, donnait un florilège éclatant du cinéma français, pure merveille indispensable.

J’ai déjà beaucoup moins accroché pour Microcosmos, feuilletage d’un champ aveyronnais où des tas de bestioles bien filmées peinent à soutenir l’attention pendant la pourtant brève durée de 80 minutes. Mais le film, bien réalisé, consensuel et d’apparence presque féérique, a séduit petits et grands et connu un grand succès public.

J’avoue n’avoir pas vu Le peuple migrateur, consacré aux oiseaux que je ne supporte plus, depuis le film d’Hitchcock qu’à l’état de perdreaux ou de faisans rôtis.

Mais pour le peuple de la mer, je me disais que, depuis Le monde du silence du Commandant Cousteau, on avait sûrement fait de stupéfiants progrès techniques et que j’allais replonger dans un univers chatoyant et rare…

Je me suis bien enquiquiné ! Oh, c’est très bien fait, et certaines images sont extrêmement spectaculaires ; on arrive, de fait, aujourd’hui, à des prises de vue stupéfiantes dans la précision et à des gros plans qui laissent rêveur ; mais comme il n’y a pas le moindre didactisme, que le commentaire est rare et matelassé de phrases pompeuses, on bâille tout de même bien souvent…

Il est vrai que la nature n’est pas, su je puis dire, ma tasse de thé, ne la trouvant jamais si belle que lorsque l’Homme la dompte (je sais, je sais ! les tremblements de terre, les tsunamis, les volcans, et tout le bataclan écologiste), et m’émerveillant toujours de l’ingéniosité des villes et de la banalité des brins d’herbe.

Faite pour la vie et le plaisir de l’Homme (que seraient le bœuf sans sa côte, l’agneau sans son gigot, la sole sans son filet ? à quoi serviraient-ils ?), la Nature, lorsqu’elle est, comme dans Océans, totalement étrangère à lui (je sais, je sais ! le plancton, la chaîne alimentaire, la diversité biologique et tout le saint-frusquin) fait assez souvent froid dans le dos. Une des images d’Océans dont je garderai le souvenir est celle d’une myriade de crabes couvrant littéralement en quelques instants un fond marin ; ils pullulent, ils prolifèrent, ils métastasent ! et ça m’a fait irrésistiblement songer au déferlement des bestioles dans le magnifique Starship troopers de Paul Verhoeven.

Il est sûrement nécessaire qu’il y ait tant de vies bizarres cachées sous la surface des eaux  ;  mais c’est tout de même bien inquiétant.

Océans me semble tout empreint de la mélancolique et suicidaire philosophie à deux balles qui voudrait que la Terre soit beaucoup mieux sans l’Humanité ; on trouve quelques fondus pour le proclamer haut et fort (ça s’appelle des antispécistes) ; grand bien leur fasse; mais quand je vois les poissons glandouiller comme ça toute la journée, et sûrement s’ennuyer un maximum, ça me fait bien plaisir d’être du bon côté de la Création. Merci, Seigneur, pour le Sixième Jour !

Leave a Reply