La conférence

avril 26th, 2023

Guide du protocole et des usages.

Glaçant. Et très convaincant. Très vraisemblable, et même très exact, réalisé d’après le compte-rendu officiel d’Adolf Eichmann. Relation de cette réunion de début 1942 où dans une élégante villa du quartier de Wannsee, près de Berlin, l’administration allemande est réunie pour régler les détails d’une solution finale dont aucun des assistants ne conteste ni la nécessité, ni l’intérêt, mais dont la gestion pose de réelles questions administratives et logistiques.. Et surtout dont la mise en œuvre entraine des bisbilles entre les différentes administrations concernées. Glaçant, disais-je parce que ça permet de constater la soumission de l’Homme à un cheminement d’autorité, même obscène ou scandaleux. Il y a une quantité de films qui montrent cette sorte d’obéissance et l’adhésion de tous à des épouvantes qui paraissent, lorsqu’elles sont partagées par tous, tout à fait admissibles. Read the rest of this entry »

Le dernier roi d’Écosse

avril 25th, 2023

L’État sauvage.

Riche nomenclature des dictateurs africains sanguinaires d’après l’indépendance ! Dictateurs qui se maintenaient généralement au pouvoir grâce aux jeux complexes des Puissances mondiales, toutes souhaitant préserver leurs intérêts économiques ou géopolitiques ou en acquérir au détriment des autres. Puis la folie d’avoir conservé sur ce continent où l’allégeance n’est pas nationale mais ethnique le corset des frontières coloniales, ce qui entraîne à la fois conflits de territoires et favoritismes effrontés. Comme l’écrivait dès 1962 le sociologue de gauche René Dumont (qui fut le premier candidat écologiste à une élection présidentielle, en 1974), L’Afrique noire est mal partie. Cinquante ans plus tard, elle n’est toujours pas arrivée, d’ailleurs.

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Dallas buyers club

avril 23rd, 2023

Ça commence à dater.

Au milieu du 14ème siècle, la peste noire a tué entre 30 et 50 % des Européens ; le choléra – qui n’a d’ailleurs pas disparu – a sévi aux 18ème et 19ème siècles avec une rare brutalité. La grippe espagnole, au 20ème a, dit-on tué plus de monde que les combattants des tranchées. Et comme notre pauvre monde n’a jamais été exempt de catastrophes, voilà qu’au début des années 80 le Sida est venu, goguenard et fatidique, rappeler aux Humains que l’idée d’une parenthèse enchantée, où tout serait permis n’était qu’une vaste blague. Ben oui, on ne peut pas impunément baiser, s’enculer et se droguer sans qu’il se passe quelque chose d’assez terrifiant. Read the rest of this entry »

Taken

avril 22nd, 2023

Drôle d’emploi pour une rencontre.

C’est sans doute parce que je ne connais pas bien les développements du cinéma mondialiste étasunien, plutôt conformé pour en mettre plein les yeux à toutes les salles de cinéma du monde. Un cinéma qui propose à l’admiration des foules des personnages surpuissants, des héros qui ne reculent devant rien mais qui ont aussi leurs failles et leurs tendresses. Rien à voir avec le cynisme indifférent de James Bond ou de Derek Flint, qui évoluaient dans un autre monde, beaucoup moins vertueux, beaucoup plus désinvolte et rieur. Au fait, en creusant un peu – à peine ! – le sujet, je me suis aperçu que le personnage de Bryan Mills, ancien agent secret presque invulnérable, s’est manifesté dans une série de trois films, toujours avec, en vedette Liam Neeson et que je n’ai regardé que le premier d’entre eux. Read the rest of this entry »

Un chien andalou

avril 19th, 2023

Fragments d’un désir amoureux.

Bien sûr que les surréalistes se sont foutus de nous et, au fur et à mesure que nous nous indignions, remettaient cent sous dans la machine ! Bien sûr que ça marchait, bien sûr que notre indignation agitait leur volupté de nous exaspérer ! Je suppose que si j’avais été un brave ancien combattant de la guerre, en 1928, dix ans seulement après l’armistice qui mettait provisoirement fin à l’horreur, j’aurais été scandalisé par cette désinvolture gamine imaginée par deux Espagnols narquois qui, ni l’un ni l’autre n’avaient connu l’abomination des tranchées et qui se croyaient de ce fait autorisés à se moquer de notre guerre civile européenne. Et que j’aurais été de ceux qui allaient saccager le Studio des Ursulines (ou qui envisageaient de le faire) parce que se ficher du monde à un point pareil, ça mérite qu’on prenne des baffes dans la gueule. Read the rest of this entry »

Sur les chemins noirs

avril 17th, 2023

La diagonale du vide.

Comment adapter au cinéma un court récit de Sylvain Tesson, (que je n’ai pas lu, mais dont je connais la trame) qui relate sa traversée de la France à pied du Sud-est au Nord-Ouest ? Une traversée effectuée en forme de défi, à la suite d’un grave accident, qui a valu à l’écrivain plusieurs mois de coma, une semi-paralysie faciale et des tas de dommages collatéraux ; lui qui se sentait tellement à l’aise dans son corps à qui il aimait infliger de drôles d’épreuves bizarres, le tour du monde à vélo, l’escalade nocturne des monuments escarpés de Paris ou (immense succès de librairie), un ermitage de six mois solitaires en Sibérie (entre février et juillet). Read the rest of this entry »

Mensonges d’État

avril 17th, 2023

La vie quotidienne des espions.

Toujours se méfier de la traduction des titres originaux : Body of lies signifie littéralement Corps de mensonges, si j’en crois le traducteur de Google. En France, cela a donné Mensonges d’État, ce qui semble jeter un regard sourcilleux, vertueux, critique, sur les pratiques des Pouvoirs publics. Mais si on cherche un peu davantage, on s’aperçoit qu’au Québec, le titre primitif est traduit en Une vie de mensonges. Et ce titre-là me semble, à cent-mille égards, le meilleur. Et de loin. Parce qu’il décrit parfaitement bien la réalité de la vie des agents secrets que les États utilisent pour lutter contre leurs ennemis. Hautes ou basses œuvres, là n’est pas la question ! On peut poser un regard vertueux (la Vertu, monstruosité obsédante du monde moderne) sur les agissements des espions de la CIA, de la DGSE, du MI5, de je ne sais pas trop quoi, chez les Russes ou chez les Chinois, mais on ne peut pas nier que les Puissances ont besoin de mecs qui travaillent derrière l’écran des apparences. Read the rest of this entry »

High sierra

avril 15th, 2023

Le bout de la nuit.

Le grand intérêt du film de Raoul Walsh est que, à rebours de la plupart des récits, il se densifie et s’approfondit au fur et à mesure qu’il progresse. D’ordinaire l’éclat des premières séquences tend à s’affadir et les derniers quarts d’heure sont assez souvent au mieux des fuligineuses tentatives pour courir vers la fin, au pire des catastrophes à la fois grotesques et mielleuses, toutes tendues vers la rassurante tranquillité du happy end. Et bien voilà que La grande évasion (assez mauvais titre, d’ailleurs, bien inférieur à l’original High sierra) devient plus intéressante et complexe au fur et à mesure de son déroulement. Read the rest of this entry »

Inside job

avril 11th, 2023

L’Oncle Picsou gagne à tous les coups.

Je me demande encore comment, moi qui ne lis guère que des romans, j’ai découvert, en 1996, L’horreur économique, ouvrage de Viviane Forrester. Moins pour le grand succès de librairie que le livre a été (on ne m’appâte pas avec ces arguments), que par la force de son titre, issu d’une phrase d’Arthur Rimbaud. Que disait la dame, en gros ? J’emprunte ces mots à Wikipédia, dont l’article est bref mais exact : les discours habituels (…) masquent les signaux d’un monde réduit à n’être plus qu’économique (ou même pire : financier, virtuel). Et un peu plus loin : Escamoté le monde de l’entrepreneur au profit des multinationales, du libéralisme absolu, de la globalisation, de la mondialisation, de la déréglementation, de la virtualité. Read the rest of this entry »

L’homme de la plaine

avril 5th, 2023

On attend encore la cavalerie !

Je ne parviens pas à comprendre comment de distingués amateurs de cinéma, dont je ne mets nullement en cause la sincérité ni la bonne foi, peuvent trouver de l’intérêt et plus, même, de l’enthousiasme à la vision de ces histoires poussiéreuses aux scénarios minimaux, quelquefois infantiles et à la lenteur pesante. Les westerns de l’époque classique me semblent, à de rares exceptions près (La prisonnière du désert) toujours bâtis sur les mêmes schémas, avec les mêmes images, les mêmes paysages rugueux, les mêmes baraques de planches, les mêmes personnages sommaires, les mêmes femmes à poigne, les mêmes mélodies sirupeuses. Il a fallu les Italiens et Sam Peckinpah pour mettre un peu de vigueur dans cette tisane.

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