As bestas

août 25th, 2022

La douceur du village.

Film fort, tendu, puissant. On pourrait écrire aussi sauvage en évoquant le décor, un hameau perdu de l’intérieur de la province de Galice, à l’extrême nord-ouest de l’Espagne. Décor à la fois grandiose et sombre à l’image des montagnes et des forêts qui l’entourent, aussi sordide, boueux, crasseux comme le sont les rudes maisons, les chemins escarpés, le ciel presque toujours couvert. Austère et rugueuse Espagne ; on retrouve dans As bestas la même sévérité, le soleil en moins, que dans Terre sans pain, un des premiers films de Luis Bunuel tourné plus au sud, en Estrémadure.

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La messe est finie

août 23rd, 2022

Journal d’un prêtre un peu las.

Drôlement intéressant et drôlement bancal, ce film qui décrit avec talent la vie sans particulier éclat d’un jeune prêtre italien en 1985 ; un jeune prêtre confronté à toutes les dures réalités de l’existence, qui laissent bien peu de place aux idéaux. Dix ans auparavant, d’ailleurs, ce jeune prêtre, Giulio (Nanni Moretti, le réalisateur du film lui-même)et sa bande d’amis romains vivaient des espérances révolutionnaires, prétendaient changer le monde par la Révolution, ce mot absurde et passe-partout où l’on met tout ce qu’on ne sait pas dire, à part sa rage et son feu intérieur. Après un ministère dans une jolie île rieuse du sud de l’Italie, Giulio est rappelé à Rome pour desservir une paroisse de la lointaine banlieue. Read the rest of this entry »

Wassup rockers

août 19th, 2022

Latinos du ghetto.

J’avais assez apprécié Bully, film le plus notoire (je pense) du réalisateur Larry Clark qui présentait la dérive criminelle d’adolescents désœuvrés, dérive qui allait les conduire à l’assassinat de l’un d’entre eux, celui qui les dominait et les brimait. Film dur, mais bien construit, bien filmé, à la fois glaçant et très intéressant. Les personnages de Wassup Rockers ne sont pas si pervers, si cruels, si terrifiants. On pourrait même presque dire qu’ils sont le contraire si, issus d’un ghetto sordide de Los Angeles, il n’étaient démunis à peu près de tout langage articulé, de toute inclination pour le travail et s’ils n’avaient cette regrettable habitude de traiter les filles – qui le leur rendent bien – comme des mecs. Ils ne fichent rien, passent leur temps à jouer une musique hystérique et inaudible à base de hurlements et de sonos poussées à fond, à parler de leur sexualité ; sexualité adolescente, puisqu’ils ont entre 13 et 15 ans et diversement conduite, certains ayant plus ou moins de succès et plus ou moins d’audace que d’autres. Read the rest of this entry »

La dernière chance (Fat city)

août 19th, 2022

La sauvagerie, en majuscules.

Je n’ai jamais pu résister, à chaque fois que j’ai regardé un film sur la boxe, de dire toute ma répugnance devant cette activité barbare ; une activité qui consiste, rappelons-nous toujours, à mettre par la violence des coups, le cerveau en court-circuit, ce qui crée naturellement des dommages irréversibles. Parallèlement il faut bien admettre que le cinéma s’est emparé de ce spectacle avec délectation et a présenté avec abondance sa dramaturgie réelle ou supposée. La page Wikipédia qui lui est consacrée compte 101 références et a dû en oublier bon nombre puisque je n’y ai pas trouvé l’intéressant Air de Paris de Marcel Carné avec Jean Gabin et Roland Lesaffre. Read the rest of this entry »

Gothika

août 7th, 2022

Vilaine fille, mauvais garçons.

Une – une seule – bonne idée peut-elle suffire à porter un film qui se veut d’épouvante ? Pourquoi non si cette idée est creusée, enluminée, exposée et parvient à irriguer tout l’espace… Si elle chatoie, séduit, finit par intriguer, inquiéter, glacer ? Le reste est l’affaire de technique, de photographie, d’acteurs et d’actrices. Et on peut même supporter les tics de réalisation d’un metteur en scène qui fait joujou avec les beaux outils que le cinéma d’aujourd’hui offre : caméras intrusives, atmosphères savamment éclairées, virtuosité des mouvements de caméra. Et ce qu’il a depuis longtemps offert, mais dont il ne faut pas pour autant abuser : plongées, contre-plongées, gros plans très gros, coups de zoom, caméra à l’épaule, etc. De meilleurs connaisseurs des techniques que moi pourront compléter. Read the rest of this entry »

La nuit du 12

août 6th, 2022

L’ombre d’un doute.

12 octobre 2016. Une soirée rieuse entre copines dans la petite ville industrielle de Saint-Jean de Maurienne en Savoie. Dans la nuit, mais pas très tard, Clara Royer (Lula Cotton-Frapier) rentre chez elle, seule. Rues vides de la bourgade. Un type qui surgit devant elle, ne dit pas un mot, l’inonde d’essence, craque son briquet. L’enflamme. L’épouvante. Au matin un pauvre corps carbonisé. L’enquête commence. On le sait, par un carton inséré au début du film, elle n’aboutira pas. Inspirée de faits réels, elle fera partie des 20% qui n’auront pas d’issue, qui demeureront sans solution. Glaçant. Read the rest of this entry »

Terminator

août 4th, 2022

Zim boum-boum spatio-temporel.

On pourrait résumer le film en une courte phrase : scénario sommaire, mais réalisation réussie ; ce qui, d’ailleurs, pourrait illustrer parfaitement la carrière de James Cameron, réalisateur parfaitement capable de mettre en œuvre de grosses machines à succès, mais certainement jamais de leur donner un peu de respiration ni de force. Je ne suis pas le dernier à reconnaître que, dans la machine cinéma, est précieux ce genre d’artisans capables de tenir en haleine les spectateurs d’un multiplexe pendant la durée règlementaire (un peu moins de deux heures, sinon il sera plus compliqué d’étager l’architecture des séances, d’en placer dans la journée autant qu’on le souhaite et on vendra un peu moins, ou beaucoup moins de sodas, de chocolats glacés et de pop-corn).

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Le jouet

août 2nd, 2022

L’histrion est de sortie.

Il y a, comme ça, des acteurs qui peuvent être irrésistibles lorsqu’ils apparaissent pour quelques minutes au milieu d’une séquence, font leur numéro et le laissent dans l’imaginaire du spectateur charmé. Mais qui pourtant n’ont pas les épaules pour porter à eux seuls la durée d’un film ; c’est-à-dire surtout lorsque le film est construit autour de leur personnalité, autour de leur originalité particulière, est bâti autour d’eux, en fonction d’eux, repose en totalité sur leurs physiques, leurs mimiques, leurs tics d’expression, leurs bouilles, leurs caractères. Dût mon point de vue indigner leurs innombrables admirateurs, j’en vois trois qui jouissent d’une réputation à mes yeux très exagérée, qui ont connu des succès considérables, parfois immenses, qui ont été appréciés par des générations de spectateurs mais qui, à mon sens, sont estimés bien au delà de leur talent. Read the rest of this entry »

La barricade du Point du Jour

juillet 29th, 2022

Le sang veut du sang.

Le film commence par un joli matin de printemps, le lundi 22 mai 1871. Il s’achève, au soir du lendemain, mardi 23 mai, dans le sang et l’horreur. La butte Montmartre est tombée aux mains des soldats versaillais presque sans assaut, tant la Commune est mal organisée. Mais les batailles dans Paris vont se poursuivre pendant plusieurs jours encore, dans ce qu’on a appelé la semaine sanglante. Les derniers combats s’achèveront du côté de Belleville et de la rue du Faubourg du Temple le dimanche 28 mai. On ne sait toujours pas combien de morts ont coûté l’insurrection et sa répression : des estimations très militantes du début du 20ème siècle sont montées jusqu’à 30.000 morts ; aujourd’hui on estime plutôt à 10.000 le nombre des tués du côté communard, à 1000 Versaillais et à plus de 100 otages (dont l’archevêque Mgr Darbois) de l’autre. Puis aussi, dans la folie du désespoir, l’incendie volontaire de plusieurs monuments, les Tuileries, l’Hôtel de Ville, le Palais de justice… Read the rest of this entry »

Ce vieux rêve qui bouge

juillet 25th, 2022

Le chaland qui passe.

Bien que ses livres aient connu un immense succès public, on ne parle plus guère de l’oeuvre abondante de Roger Peyrefitte. Littérairement parlant, c’est assez dommage parce que Les amitiés particulières (dont Jean Delannoy tira un film qui n’est pas mauvais), Les AmbassadesLes clés de Saint Pierre, ça valait largement la peine. Tout autant que les récits mémorialistes (Propos secrets), pleins d’ironie, de verve, de culture. Et de racontars. On apprenait des tas de choses qui n’étaient très dissimulées que pour les braves gens qui n’étaient pas admis dans la bonne société.

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