Panique

film-panique3La haine

Découvrant Panique – au titre si adapté à la chasse à l’homme qui le conclut – je n’ai évidemment pu m’empêcher de comparer le film de Duvivier à l’autre adaptation tirée du roman de Simenon, le bien plus récent Monsieur Hire de Patrice Leconte… Comment faire autrement, mais que dire de deux œuvres à l’esprit si différent, bien qu’elles soient fondées sur la même trame ?

J’aime beaucoup le film de Leconte, j’aime beaucoup Michel Blanc et Sandrine Bonnaire, et sa musique, obsédante et somptueuse, du grand Michael Nyman ; ex abrupto, il me semble plus attachant qu’un Panique à l’intrigue moins resserrée, moins vénéneuse, moins glacée, plus classiquement contée, avec des séquences un peu trop traditionnelles (la rencontre des deux amants, Alfred – Paul Bernard – et Alice – Viviane Romance – derrière l’église, et l’émoi de la fille perdue à l’écoute des cantiques – comme dans Casque d’or -) ou des séquences presque bouffonnes (le petit monde des commerçants de Villejuif et de leurs clients) ; il y a dans Panique, en tout cas au début, un côté Étude de mœurs narquoise et cruelle qui me semble assez facile…

panique-julien-duvivier-1946-L-xUMybyMais à bien y réfléchir, un des aspects terrifiants du roman de Simenon – l’aversion physique ressentie par tous devant le personnage de Hire – est sans doute beaucoup mieux rendu par l’allure gluante de Michel Simon, sorte de croquemitaine incompris et détesté instinctivement par tous (en partie à raison : il me semble me souvenir que, dans le roman, il traîne derrière lui une sale affaire de mœurs), alors qu’il ne demande que l’indifférence, à défaut de la compréhension, puisqu’il a renoncé depuis longtemps à la sympathie des humains… Le Hire interprété par Michel Blanc est beaucoup plus attachant, beaucoup plus pathétique, parce qu’il espère – et regrette – beaucoup plus…

panique-julien-duvivier-1946-L-F_dn9uLes scènes finales de Panique sont, elles, fort réussies, même si elles demeurent, dans la cristallisation de la haine sauvage de la foule, un peu trop emphatiques, voire artificielles ; signe cruel : Hire, traqué, s’engouffre dans un immeuble pour se réfugier sur le toit : cet immeuble, c’est – on peut le supposer – une coopérative ouvrière dont la façade porte le nom : Le lavoir de la Fraternité ; belle vacherie ironique d’un réalisateur qui n’a jamais misé un sou sur l’innocence de l’âme humaine !

Enfin, voilà ; ce n’est sûrement pas un très bon Duvivier, il y a des ruptures de ton, des faiblesses de construction et Viviane Romance, éternelle garce du cinéma français n’a pas la finesse de jeu de Sandrine Bonnaire ; mais c’est tout de même bien intéressant…

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