Pascaline et Klara, étudiantes, cherchent avenir…

pascaline-et-klaraLe sens de la vie.

Voilà un téléfilm très intéressant, plutôt mieux filmé et mieux rythmé que les habituels sujets de société qui font florès sur les écrans et qui décrivent avec une volonté d’authenticité, de réalisme et de franchise des vies banales (banal n’est pas un mot péjoratif : je l’emploie en antonyme d‘aventurier et des films où l’on montre, par exemple, la traversée du désert de Gobi par un cycliste asthmatique ou l’ascension du Machu Pichu par un unijambiste daltonien).

Il faut dire que le format de 52 minutes est excellent et permet d’entrer, sans ennuyer, dans la vie quotidienne de deux jeunes filles du siècle, malheureusement engluées dans les tourments du même siècle.

Pascaline et Klara sont toutes les deux étudiantes en Arts du spectacle dans l’UFR Arts, Lettres, Communication de l’Université de Rennes II. Écrivant cela, j’ai tout dit, pour qui connaît un peu le système universitaire français. Pour ceux qui en seraient moins familiers, et pour faire court, disons qu’avec ce genre de formation, dans l’université la plus grévicole de France, elles n’ont absolument aucune chance raisonnable de s’en sortir. Il se peut qu’elles commencent à s’en rendre compte, et que, bien qu’elles veuillent garder la tête haute, elles voient bien que leur rêve d’échapper à leur condition soit en train de s’effriter.

pascalineetklara_photo2L’une et l’autre ne sont pas identiques, toutefois : Pascaline est la fille d’un couple de tout petits restaurateurs d’un village breton ; ses parents estiment appartenir à la classe moyenne inférieure, n’avoir aucune chance de monter une marche et doutent de la possibilité de leur fille de le faire, mais ils l’aident petitement pour ses études. Klara, à ce qu’on décèle, a eu un parcours moins stable : sa mère a beaucoup changé d’adresse, a vécu dans un squat, ne peut sans doute pas lui donner un kopeck ; elle est davantage militante, davantage révoltée, joue davantage à être insouciante (j’ai envie de me casser à l’étranger), alors que Pascaline, qui, à la fin du film est pleine d’espérance parce qu’elle a pu décrocher un stage à France-Culture, semble aussi plus résignée… Et cela bien qu’elle ne cesse de regarder en arrière avec angoisse (C’est pas dévalorisant d’être serveuse, mais c’est pas mon but ; Campagnarde, c’est pas péjoratif : on n’a pas honte des siens, mais on ne voudrait pas vivre leur vie).

Les deux jeunes filles – apparemment surtout Klara – sont féministes et militent au Nouveau Parti Anticapitaliste, trotskyste, tendance Franckiste, ennemie jurée des tendances Lambertistes et Pablistes – je sais, c’est compliqué : si ça vous amuse, voir votre Wikipédia habituel). Le NPA, habituellement illustré par M. Olivier Besancenot, a été représenté à l’élection présidentielle de 2012 par M. Philippe Poutou, qui a royalement récolté 1,15% des voix.

De toute façon, pour Pascaline et Klara, il n’y avait guère le choix qu’entre M. Poutou et Mme Éva Joly (2,31% des voix), le cas de Mlle Nathalie Artaud (0,56%), issue d’une autre famille trotskyste (celle de Mlle Arlette Laguillier) n’étant pas évoqué, et un vote pour l’éructant M. Jean-Luc Mélanchon (11,10%) apparaissant presque comme une concession à la bourgeoisie capitaliste… On voit là aussi que les perspectives sont lumineuses.

J’ai l’air de me moquer, je me moque d’ailleurs un peu, et en même temps je ressens beaucoup de tristesse pour ces deux jeunes filles plutôt charmantes et gaies, pas plus sottes que beaucoup d’autres et qui malgré un vocabulaire apparemment très limité et une tendance récurrente – et bien actuelle – à ponctuer tous leurs propos de Tu vois et de Voilà ! ont un discours assez construit. Qui est coupable ? Toutes les politiques qui ont laissé croire à des générations de jeunes gens (et de parents) que le baccalauréat avait de la valeur et que toutes les études ouvrent la voie à un emploi. Parvenus à la maîtrise, beaucoup de ces étudiants à avenir bouché se rendent compte qu’on les a roulés, mais que faire ?

Le capitalisme a gagné, exportant la fabrication de masse dans les pays à bas coût et réduisant ainsi au chômage les ouvriers professionnels et important, avec la complicité du gauchisme, les masses d’immigrés pour les services non délocalisables.

Pauvres petites filles pauvres…

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