S’il n’est pas très élégant de se citer, il y a des tas de fois où c’est bien pratique et où ça évite de redire (souvent moins clairement) les mêmes choses. Voilà donc bien ce que j’écrivais en mars 2019, sur le film d’Éric Lavaine intitulé Barbecue : Au final une pitrerie formatée pour les assoupissants dimanches soir de TF1. Remarquez, c’est bien comme ça, sur cette chaîne, à cette heure et dans cet esprit que je l’aie vue. Je n’avais jusque là entendu parler ni du film, ni de son auteur et je m’en étais fort bien porté. Mais la paresse est mauvaise conseillère.
Mais si comme le dit notre vieil ami Héraclite (que j’évoque souvent en ce moment), on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, on est tout à fait à même de refaire souvent les mêmes bêtises. C’est dans un identique état d’esprit flemmardeux et pour de similaires raisons, qu’un nouveau dimanche soir et toujours sur TF1 (on ne peut pas se tromper) que – ô merveille ! – j’ai regardé Retour chez ma mère qui m’a fait aussi mauvaise impression de vacuité que son film prédécesseur.
Barbecue s’appuyait sur la vieille recette des films de copains qui se retrouvent en vacances dans une belle maison avec toute la couche d’hypocrisies, de filouteries, de jalousies, de non-dits et de quiproquos que la situation le permet. Il y en a des dizaines et des dizaines, de très réussis et de très médiocres.
Mêmement peut-on dire d’un des ponts-aux-ânes des scénaristes : les retrouvailles des membres d’une famille dans la maison ancestrale, autour d’un aïeul, d’un oncle, d’une mère. Ça peut se traiter sur tous les modes : glaçant, comme Festen de Thomas Vinterberg, rose et gris, comme Ma saison préférée d’André Téchiné, nostalgique et drôle comme Milou en mai de Louis Malle. Le matériau familial est si vaste et on pourrait dire aussi tellement élastique qu’il supporte tous les regards et toutes les orientations, même les banalités.
J’ai vaguement l’impression qu’Éric Lavaine a un peu guigné sur la veine qu’on pourrait appeler Jaoui/Bacri, habituellement réussie même si Un air de famille a été mis en scène par Cédric Klapisch et si Parlez-moi de la pluie n’est franchement pas excellent. Mais n’est pas le duo qui veut.
Retour chez ma mère est tellement formaté qu’on n’y reçoit, à aucun moment, aucune surprise, que tout se déroule dans un rythme propre à la digestion vespéro-dominicale (joli néologisme, n’est-ce pas ?) propice à l’endormissement qui conduira vers la nouvelle semaine de boulot ; c’est d’ailleurs assez bien conçu pour que le réalisateur ait tourné Un tour chez ma fille qui, d’évidence, reprend recettes et personnages du premier opus (sortie prévue en juillet 2021).
Donc Stéphanie (Alexandra Lamy), après un licenciement, est obligée de se réfugier chez sa mère Jacqueline (Josiane Balasko) qui a non seulement une façon de vivre sa vie bien à elle (notamment l’écoute ininterrompue des chansons à prétentions poétiques de Francis Cabrel), mais aussi un amant, Jean (Didier Flamand), le voisin du dessus, qu’elle ne veut pas trop exhiber. Viennent se greffer là-dessus Nicolas (Philippe Lefebvre) et Carole (Mathilde Seigner), frère et sœur de Stéphanie, Carole étant flanquée de son mari Alain (Jérôme Commandeur).
Aigreurs, jalousies, secrets de famille, pudibonderies et cachotteries. Vous tricotez tout ça, dispersez façon puzzle et vous obtenez la durée de 86 minutes, ce qui vaut un demi-point, la brièveté étant rarement de mise désormais. Un autre demi-point pour un échange assez réussi à base de quiproquos : Jacqueline a préparé un plat picard (c’est-à-dire une flamiche, la fameuse tarte aux poireaux) et les enfants craignent que ce ne soit un plat de chez Picard, la plus encore fameuse enseigne de surgelés sans goût.
Bon c’est tout. Rideau.