Terminator

Zim boum-boum spatio-temporel.

On pourrait résumer le film en une courte phrase : scénario sommaire, mais réalisation réussie ; ce qui, d’ailleurs, pourrait illustrer parfaitement la carrière de James Cameron, réalisateur parfaitement capable de mettre en œuvre de grosses machines à succès, mais certainement jamais de leur donner un peu de respiration ni de force. Je ne suis pas le dernier à reconnaître que, dans la machine cinéma, est précieux ce genre d’artisans capables de tenir en haleine les spectateurs d’un multiplexe pendant la durée règlementaire (un peu moins de deux heures, sinon il sera plus compliqué d’étager l’architecture des séances, d’en placer dans la journée autant qu’on le souhaite et on vendra un peu moins, ou beaucoup moins de sodas, de chocolats glacés et de pop-corn).

Car ce genre de films, qu’on le veuille ou non, qu’on le déplore ou qu’on s’en fiche est vraiment formaté pour les publics qui ne demandent au cinéma que des explosions, des poursuites automobiles grisantes, quelques images violentes, ou cruelles, ou repoussantes, des mitraillages qui font vibrer les haut-parleurs de basses des salles de banlieue, des personnages sommaires et univoques, des récits point trop embrouillés mais qui donnent aux bonnes gens l’impression d’être entrées dans les arcanes de la pensée complexe.

Je ne devrais pas trop jeter ce venin-là ; après tout j’ai été, comme tout le monde, comme tous les amateurs de récits de science-fiction, fasciné par les questions posées par le paradoxe temporel. Ce qui a été posé assez clairement par René Barjavel en 1944 dans son délicieux roman Le voyageur imprudent que mit en scène Pierre Tchernia : Il n’a pas tué son grand-père, donc il existe ; donc il a tué son grand-père, donc il n’existe pas et ainsi de suite.

Terminator est construit, à la base, sur cette mine d’or : en 2029, sur une Terre ravagée par les retombées atomiques et où les machines semi-vivantes ont pris le pouvoir et traquent les humains qui subsistent, sont envoyés dans le passé, en 1984, un robot invincible, invulnérable, presque immortel le Terminator (Arnold Schwarzenegger) chargé d’éliminer Sarah Connor (Linda Hamilton), future mère de John Connor, le chef ultérieur de la résistance à la tyrannie des machines. En même temps, la résistance humaine a envoyé dans le passé Kyle Reese (Michael Biehn), un de ses meilleurs combattants afin de protéger Sarah et lui permettre de donner la vie au futur chef de la résistance.

Il faut être bien nigaud pour ne pas saisir que ces relations connaîtront une issue amoureuse. Ma foi, pourquoi pas ? Les invraisemblances sont parties prenantes du genre et il faut les accepter comme telles, dans cette sorte de conte de fées abominable, violent, cruel.

Car le Terminator est vraiment une sale bête, dépourvue de toute émotivité et – comme la machine obtuse qu’il est – uniquement vouée à l’accomplissement de sa mission : tuer Sarah Connor avant qu’elle ait rencontré le géniteur qui mettra fin au règne des machines. Il n’est pas impossible d’estimer que James Cameron en fait là-dessus un peu trop et qu’on finit d’en avoir un peu marre de voir le cyborg, qui n’a aucune peine à survivre à des mitraillages en règle et à perdre un œil, échapper également à l’explosion incandescente de la citerne d’un gigantesque semi-remorque en ne perdant que son apparence humaine extérieure, puis à une grenade de nitroglycérine qui le coupe presque en deux et ne devoir expirer que sous l’écrasement d’une monstrueuse presse mécanique.

Il est vrai que c’est un peu une obligation des films horrifiques : lorsque l’on croit que le monstre, le tueur, le zombie, le maniaque a été éliminé, surgit en dernier sursaut son dernier geste de haine. Mais bon, j’aurais autant aimé que le film comptât un quart d’heure de moins puisque tout était alors défini.

Cela dit, c’est vraiment très spectaculaire, tourné avec de gros moyens. Ceux qui apprécient les poursuites en voiture, les staccatos des armes automatiques et la violence hurlante en auront pour leur soûl. Et même si l’on n’est pas de ceux-là, on peut apprécier l’inventivité de certaines séquences.

La distribution n’est pas mal faite et Arnold Schwarzenegger est absolument parfait en créature obtuse et machinale. Ce qui est davantage surprenant, c’est que les électeurs de Californie l’ont élu par deux fois à l’important poste de Gouverneur de l’État. Comment pourrait-on comprendre ça dans notre chère vieille Europe ?

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