The wicker man

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Surprenante découverte…

Le remake éponyme de Neil Labute, avec Nicolas Cage a été fort mal accueilli, ce qui m’a donné plus envie encore depuis quelque temps, compte tenu des points de vue laudatifs cueillis ici et là, de regarder cet étrange Wicker man

Malgré d’évidentes faiblesses, et même quelques séquences hautement ridicules (Lord Summerisle – Christopher Lee – déguisé en femme, avec une longue perruque noire conduisant la Procession de Mai), malgré le discours trop guindé de Jean-Pierre Dionnet qui présente le film et qui fait mine de croire que les mômeries celtistes devraient pouvoir être prises au sérieux, malgré une faille dans la structure, sur quoi je vais revenir, j’ai passé un très bon moment plongé dans un récit finalement assez horrifique, mais peu traditionnel ; ça m’a changé des vampires, des zombies et des satanistes dont je fais mon ordinaire dans le domaine des chocottes recherchées.

wm2La faille du récit, à mes yeux, c’est l’origine donnée au paganisme des îliens par Lord Summerisle : son grand-père aurait, en achetant l’île, réintroduit, en quelque sorte, une religion tellurique, plus conforme aux aspirations d’habitants de ces contrées situées aux confins du monde, pays qui devrait n’être que de landes rases, de bruyère, de tourbe, de pluie, de paysages lunaires mais qui bénéficie d’un micro-climat plus généreux; son père aurait poursuivi, par amour (de l’île) dans cette voie, où lui-même se trouverait au mieux…

J’aurais préféré que ces vieux courants druidiques fussent présentés comme n’ayant jamais disparu, ayant toujours été sous-jacents à une apparente soumission au christianisme qui, se retirant de leur paysage, leur aurait permis de réapparaître : car la conversion au paganisme, qui semble être unanimement adopté par toute la population me semble plus aléatoire et invraisemblable… Population dont les trognes, soit dit en passant, me font penser à celles des Chiens de paille

Cela dit, j’ai eu l’impression, aux meilleurs moments du film, qui ne sont pas rares, de me trouver dans un des épisodes de la fabuleuse série onirique du Prisonnier de Patrick McGoohan, avec le même décalage entre l’apparente courtoisie de la population, et des évènements terribles qui se trament ou se déroulent… Et en plus, c’est un Prisonnier fort peu sage, où règnent l’anarchie sexuelle (l’orgie au clair de lune) et le sadisme (le scarabée enfermé dans le bureau de la salle de classe, qui tourne jusqu’à s’étrangler lui-même).

Étrange film, vraiment, doté d’une musique étrange, irréelle, très peu semblable aux musiques habituelles, musique hors du temps, hors de l’espace, hors de notre espace, sans doute, et c’est sûrement là aussi ce qu’a voulu le réalisateur Robin Hardy : un décalage à la fois très subtil, et d’une grande évidence par rapport au monde que nous habitons ; c’est aussi le sens de la juxtaposition de rivages désolés, que j’ai dit plus haut, et la luxuriance, due prétendument à une langue du Gulf-stream, de la végétation intérieure, palmiers, magnolias, rhododendrons…

The-Wicker-Man-821S’il n’y avait pas la déplorable idée d’un Christopher Lee ridiculement attifé, la Procession finale, dans sa sauvagerie baroque, serait parfaite : elle fait songer à toutes les survivances carnavalesques, dionysiaques, barbares photographiés avec grand talent par Jean-Marie Steinlein (www.uniterre.com/perso/jmsteinlein/image(..)), aux affreux personnages couverts de lie de vin qui agressent Mona à la fin de Sans toit ni loi , à tous ces jours de folie où la rationalité disparaît…

Et comment ne pas être saisi par la magnifique affreuse séquence finale, avec le Wicker man embrasé qui offre en holocauste à la Nature déifiée le malheureux policier Howie (Edward Woodward) à la terreur palpable … ?

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